Mise à jour
Après un échange téléphonique que nous avons eu à 16h avec le service presse, H2DS a finalement revu la présentation commerciale de son produit. Il répond désormais "au projet des spécifications fonctionnelles". Une adjonction plus en phase avec la réalité, les spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation n'étant pas encore officialisées.
Première diffusion
Christope Painset, PDG de la société H2DS a été interviewé par France Info sur le thème des logiciels de sécurisation. L’intéressé a donné des détails sur ISIS, sa solution de sécurisation qui se propose d’aider l’abonné à se sécuriser contre le risque Hadopi : cette solution « permet d’apporter la preuve de la bonne foi, sur la base des spécifications techniques émises par la Hadopi ». La société est l'une des premières à se lancer sur cette niche, mais les propos doivent cependant être expliqués, et nuancés.
Payer plus pour moins d'Internet
ISIS est un logiciel qui va, entre autres, vérifier si la connexion est sécurisée, tout en permettant à l’utilisateur de sécuriser son accès (clé wifi, etc.). Sur son site officiel, l’éditeur assure qu’« Isis vous protège face aux personnes malveillantes désirant tirer parti de votre ligne. De même, si dans votre entourage, quelqu'un souhaitait effectuer un téléchargement, celle-ci sera prévenue du risque que représente le téléchargement, et ce dernier sera bloqué par Isis. Enfin, Isis permet de "surfer" en toute sécurité en bloquant les sites malveillants ou déconseillés ».
Le logiciel propose le « filtrage des téléchargements par type de fichier (fichiers vidéo, fichiers audio, archives, etc.) » voire « le blocage d'applications P2P, ou de téléchargement illégal, comme Emule » et « le contrôle de sites web de votre choix qu'il vous paraît bon de bloquer l'accès ».
2,5 euros par mois
La société propose un forfait de 2,5 euros par mois, soit 30 euros par an… à multiplier par le nombre de postes. « Tous vos postes doivent apporter la preuve que vous avez sécurisé vos accès ». À 2,5 euros par mois et par machine, autant dire que la note peut monter rapidement, même si des versions multipostes existent (voir notre capture).
Voilà donc un acteur privé qui se lance naturellement sur ce nouveau marché, comme l'anticipait Franck Riester à l’Assemblée nationale ou plus tôt encore Olivier Henrard.
Le rapporteur Franck Riester, aujourd’hui membre d’Hadopi, expliquait que « les moyens de sécurisation mis en place ne sauraient être gratuits, à l’image des logiciels de contrôle parental, mis à la disposition des consommateurs à titre payant, même si leur prix est modique. » ll refusait ainsi les amendements visant à rendre obligatoirement gratuites ces solutions.
Dans nos colonnes en juin 2008, Olivier Henrard, architecte d’Hadopi, ne nous disait pas autre chose : « à partir du moment où les internautes vont avoir intérêt à installer ce genre de dispositif (…)il existera donc une demande solvable. » Nous anticipions alors, une hausse possible des abonnements Internet (accès internet + couverture du risque Hadopi)...
Sécurité juridique relative dans l'usage de solutions de sécurité
Toutefois, ces solutions n’offrent pas de gage de résultat : ce sont des outils qui peuvent servir à démontrer la sécurisation de son accès si un jour Hadopi venait à vous demander des comptes. Mais la démonstration de l’usage de tel ou tel logiciel n’entraîne nullement la preuve de l’innocence de l’abonné dans l’esprit d’Hadopi.
La finesse de la loi est que l’autorité pourra toujours décider que cet abonné a mal sécurisé son accès même s’il a acheté et installé telle ou telle solution en « bon père de famille ».
Un logiciel qui suit des spécifications fonctionnelles non finalisées
Sur son site, H2DS présente son logiciel comme étant le « 1er logiciel (à répondre) aux spécifications fonctionnelles d'Hadopi ». En fait, l’argument est très rapide, voire trompeur : ce n’est qu'à la fin de l’année qu’Hadopi publiera les spécifications fonctionnelles définitives. En octobre dernier, H2DS nous avait d'ailleurs adressé un courrier pour nous dire que son logiciel ISIS avait été conçu en suivant les « spécifications fonctionnelles communiquées par l’Hadopi le 26 juillet 2010 ». À cette date, ces spécifications n’étaient qu’un projet, sûrement pas leur version définitive qui n'existe pas encore.
Revenons aux spécifications labellisées. Quelle en sera l'utilité ? Son strict respect permettra aux logiciels de sécurisation de prétendre à l’obtention d’un label. Les labels sont généralement des critères de qualité, de confiance, tout en étant un argument commercial. Mais pas toujours.
La finesse d’Hadopi – toujours elle – est que malgré le respect de ces spécifications, le label n’a de confiance que le nom : l’Hadopi pourra toujours décider de transmettre un dossier au Parquet même si l’abonné a payé et installé une solution labellisée. Pourquoi ? Car il n’y a pas de couplage mécanique entre l'utilisation d’un logiciel de sécurisation labellisé et la preuve absolue de l’innocence de l’abonné.
Faire confiance à l'Hadopi dans l'appréciation du label de confiance
Cela parait inique, injuste, stupide, illogique, absurde, mais c’est la loi. À l’Assemblée nationale, Mireille Imbert-Quaretta, présidente de la Commission de Protection des Droits au sein d’Hadopi le disait en des termes plus fleuris : « nous n’allons pas imposer des moyens de sécurisation labellisés. En revanche, lorsque l’internaute aura installé un système labellisé, son cas sera examiné avec une attention bienveillante… » Il faudra donc faire confiance à l’Hadopi dans son appréciation des labels de confiance apposés sur des logiciels commerciaux, au code fermé.
La perversité de la sécurisation
L’autre charme de ces outils est que plus l’abonné sera sécurisé, plus il évitera le risque Hadopi. Mais non le risque contrefaçon (notre article). Maitre Eolas, avocat et blogueur, décrivait avec son style habituel, le caractère vénéneux de cette mâchoire : « on constate que votre abonnement a servi à télécharger illégalement, et que s’il a pu servir à cela, c’est qu’il n’était pas assez sécurisé. Si vous apportez la preuve de sa sécurisation absolue ou presque, vous apportez la preuve que c’est vous qui avez téléchargé. Dans les deux cas, vous pouvez être sanctionné. Pervers, n’est-ce pas ? »
Des effets concurrentiels de la sécurisation
Pour en revenir à la solution de l’entreprise H2DS, si l'on en croit l'interview à France Info, ISIS n’est disponible que sous Windows, un jour prochain sur Mac et Android, mais la version pour Linux n'est pas dans les cartons.
Durant les débats parlementaires, les amendements visant à imposer des solutions multipostes, indépendantes de l’OS, avaient été rejetés le député rapporteur du texte, Franck Riester. Il s'en expliquait à l’Assemblée : « il faut laisser au consommateur sa totale liberté de choix en fonction de son système d’exploitation. L’interopérabilité n’est pas nécessaire pour les consommateurs et elle est trop contraignante pour les éditeurs de logiciels »
Voilà donc les charmes d’Hadopi qui se dévoile chaque jour un peu plus : des labels de confiance qui ne garantissent pas de résultat, un marché anxiogène, coûteux financièrement ou juridiquement pour l’abonné, et qui risque d’accentuer la prédominance de Windows.
"Hadopi, ca marche très bien" déclarait Frédéric Mitterrand.
Après un échange téléphonique que nous avons eu à 16h avec le service presse, H2DS a finalement revu la présentation commerciale de son produit. Il répond désormais "au projet des spécifications fonctionnelles". Une adjonction plus en phase avec la réalité, les spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation n'étant pas encore officialisées.
Première diffusion
Christope Painset, PDG de la société H2DS a été interviewé par France Info sur le thème des logiciels de sécurisation. L’intéressé a donné des détails sur ISIS, sa solution de sécurisation qui se propose d’aider l’abonné à se sécuriser contre le risque Hadopi : cette solution « permet d’apporter la preuve de la bonne foi, sur la base des spécifications techniques émises par la Hadopi ». La société est l'une des premières à se lancer sur cette niche, mais les propos doivent cependant être expliqués, et nuancés.

Payer plus pour moins d'Internet
ISIS est un logiciel qui va, entre autres, vérifier si la connexion est sécurisée, tout en permettant à l’utilisateur de sécuriser son accès (clé wifi, etc.). Sur son site officiel, l’éditeur assure qu’« Isis vous protège face aux personnes malveillantes désirant tirer parti de votre ligne. De même, si dans votre entourage, quelqu'un souhaitait effectuer un téléchargement, celle-ci sera prévenue du risque que représente le téléchargement, et ce dernier sera bloqué par Isis. Enfin, Isis permet de "surfer" en toute sécurité en bloquant les sites malveillants ou déconseillés ».
Le logiciel propose le « filtrage des téléchargements par type de fichier (fichiers vidéo, fichiers audio, archives, etc.) » voire « le blocage d'applications P2P, ou de téléchargement illégal, comme Emule » et « le contrôle de sites web de votre choix qu'il vous paraît bon de bloquer l'accès ».
2,5 euros par mois
La société propose un forfait de 2,5 euros par mois, soit 30 euros par an… à multiplier par le nombre de postes. « Tous vos postes doivent apporter la preuve que vous avez sécurisé vos accès ». À 2,5 euros par mois et par machine, autant dire que la note peut monter rapidement, même si des versions multipostes existent (voir notre capture).
Voilà donc un acteur privé qui se lance naturellement sur ce nouveau marché, comme l'anticipait Franck Riester à l’Assemblée nationale ou plus tôt encore Olivier Henrard.
Le rapporteur Franck Riester, aujourd’hui membre d’Hadopi, expliquait que « les moyens de sécurisation mis en place ne sauraient être gratuits, à l’image des logiciels de contrôle parental, mis à la disposition des consommateurs à titre payant, même si leur prix est modique. » ll refusait ainsi les amendements visant à rendre obligatoirement gratuites ces solutions.
Dans nos colonnes en juin 2008, Olivier Henrard, architecte d’Hadopi, ne nous disait pas autre chose : « à partir du moment où les internautes vont avoir intérêt à installer ce genre de dispositif (…)il existera donc une demande solvable. » Nous anticipions alors, une hausse possible des abonnements Internet (accès internet + couverture du risque Hadopi)...
Sécurité juridique relative dans l'usage de solutions de sécurité
Toutefois, ces solutions n’offrent pas de gage de résultat : ce sont des outils qui peuvent servir à démontrer la sécurisation de son accès si un jour Hadopi venait à vous demander des comptes. Mais la démonstration de l’usage de tel ou tel logiciel n’entraîne nullement la preuve de l’innocence de l’abonné dans l’esprit d’Hadopi.
La finesse de la loi est que l’autorité pourra toujours décider que cet abonné a mal sécurisé son accès même s’il a acheté et installé telle ou telle solution en « bon père de famille ».
Un logiciel qui suit des spécifications fonctionnelles non finalisées
Sur son site, H2DS présente son logiciel comme étant le « 1er logiciel (à répondre) aux spécifications fonctionnelles d'Hadopi ». En fait, l’argument est très rapide, voire trompeur : ce n’est qu'à la fin de l’année qu’Hadopi publiera les spécifications fonctionnelles définitives. En octobre dernier, H2DS nous avait d'ailleurs adressé un courrier pour nous dire que son logiciel ISIS avait été conçu en suivant les « spécifications fonctionnelles communiquées par l’Hadopi le 26 juillet 2010 ». À cette date, ces spécifications n’étaient qu’un projet, sûrement pas leur version définitive qui n'existe pas encore.
Revenons aux spécifications labellisées. Quelle en sera l'utilité ? Son strict respect permettra aux logiciels de sécurisation de prétendre à l’obtention d’un label. Les labels sont généralement des critères de qualité, de confiance, tout en étant un argument commercial. Mais pas toujours.
La finesse d’Hadopi – toujours elle – est que malgré le respect de ces spécifications, le label n’a de confiance que le nom : l’Hadopi pourra toujours décider de transmettre un dossier au Parquet même si l’abonné a payé et installé une solution labellisée. Pourquoi ? Car il n’y a pas de couplage mécanique entre l'utilisation d’un logiciel de sécurisation labellisé et la preuve absolue de l’innocence de l’abonné.
Faire confiance à l'Hadopi dans l'appréciation du label de confiance
Cela parait inique, injuste, stupide, illogique, absurde, mais c’est la loi. À l’Assemblée nationale, Mireille Imbert-Quaretta, présidente de la Commission de Protection des Droits au sein d’Hadopi le disait en des termes plus fleuris : « nous n’allons pas imposer des moyens de sécurisation labellisés. En revanche, lorsque l’internaute aura installé un système labellisé, son cas sera examiné avec une attention bienveillante… » Il faudra donc faire confiance à l’Hadopi dans son appréciation des labels de confiance apposés sur des logiciels commerciaux, au code fermé.
La perversité de la sécurisation
L’autre charme de ces outils est que plus l’abonné sera sécurisé, plus il évitera le risque Hadopi. Mais non le risque contrefaçon (notre article). Maitre Eolas, avocat et blogueur, décrivait avec son style habituel, le caractère vénéneux de cette mâchoire : « on constate que votre abonnement a servi à télécharger illégalement, et que s’il a pu servir à cela, c’est qu’il n’était pas assez sécurisé. Si vous apportez la preuve de sa sécurisation absolue ou presque, vous apportez la preuve que c’est vous qui avez téléchargé. Dans les deux cas, vous pouvez être sanctionné. Pervers, n’est-ce pas ? »
Des effets concurrentiels de la sécurisation
Pour en revenir à la solution de l’entreprise H2DS, si l'on en croit l'interview à France Info, ISIS n’est disponible que sous Windows, un jour prochain sur Mac et Android, mais la version pour Linux n'est pas dans les cartons.
Durant les débats parlementaires, les amendements visant à imposer des solutions multipostes, indépendantes de l’OS, avaient été rejetés le député rapporteur du texte, Franck Riester. Il s'en expliquait à l’Assemblée : « il faut laisser au consommateur sa totale liberté de choix en fonction de son système d’exploitation. L’interopérabilité n’est pas nécessaire pour les consommateurs et elle est trop contraignante pour les éditeurs de logiciels »
Voilà donc les charmes d’Hadopi qui se dévoile chaque jour un peu plus : des labels de confiance qui ne garantissent pas de résultat, un marché anxiogène, coûteux financièrement ou juridiquement pour l’abonné, et qui risque d’accentuer la prédominance de Windows.
"Hadopi, ca marche très bien" déclarait Frédéric Mitterrand.