La Quadrature du net a publié hier une version consolidée et intégrale du texte de l’ACTA. Cette version comprend les noms des parties autour de la table des négociations qui se sont tenues à Lucerne, accompagnés de leur position. Cette information est on ne peut plus utile puisqu’elle permettra de déterminer les positions influentes dans les futures versions du traité anticontrefaçon.
Responsabilisation des intermédiaires techniques
Le texte est riche et vise aussi bien la détermination des dommages-intérêts dans le cadre des procédures juridictionnelles, la collecte des preuves, etc. L’article 2.18 vise spécifiquement le renforcement des procédures dans les environnements numériques, en façonnant la responsabilité des intermédiaires techniques, FAI en tête, et en démultipliant les hypothèses de responsabilités de ceux-ci sur les contenus échangés dans leurs tuyaux.
Il est spécialement prévu des dispositifs destinés à retirer ou filtrer préventivement l’accès à des contenus contrefaisant dès lors que l’intermédiaire en une connaissance suffisante de leur existence. Le texte souffle le chaud et le froid puisque dans le même temps, il n’impose pas une obligation de surveillance proactive (3bis de l’article 2.18) mais demande une coopération mutuelle entre les FAI et les ayants droit. Signalons au passage l’obligation pour un FAI de révéler rapidement l’identité d’un abonné à cet ayant droit, sur demande des autorités juridictionnelles.
Mardi dernier, rapporte Owni, Joan Enciu (S&D) à la Commission Libé s’est demandé, à l’occasion d’une réunion concernant ACTA : « les fournisseurs d’accès à Internet doivent-ils être tenus responsables des actions commises par leurs clients et sont-ils obligés d’appliquer un filtrage du trafic sur leur réseau ? Dans ce cas-là, on pourrait arriver à des problèmes de violation de la liberté d’expression et de la vie privée. »
Mesures anti contournement, sacralisation des DRM
Le texte demande également que soient adoptées des mesures sanctionnant le contournement des verrous technologiques effectifs, ainsi que toute diffusion, importation ou distribution de ces informations, à la manière de ce que prévoit en France la loi DADVSI. A chaque étage du sandwich d’obligations, sont demandés des mesures effectives, efficaces, suffisantes, témoignant de la volonté des cocontractants d’imposer un standard, un haut niveau d’obligations en matière de lutte contre les contenus non autorisés.
Echelle commerciale
Lors de la dernière réunion ACTA en commission Libé, Karel De Gucht, le commissaire européen en charge du commerce, exposera plus tard que le dispositif de sanction pénale touchant à l’échange de fichiers, ne concernera que les échanges à « échelle commerciale ». Cette échelle commerciale n’est cependant pas forcément liée à un échange financier. mais peut viser un avantage significatif. Pour reprendre l’image d’Hadopi, on se souvient que les ayants droit se réservent la possibilité de faire ouvrir une procédure pénale à partir d’un certain nombre de fichiers échangés (notre actualité).
Selon Owni encore, deux nouveaux rounds sont d’ores et déjà prévus autour d’Acta, l’un à Washington (États-Unis) cet été, un autre au Japon à la rentrée de septembre.