Dans un article publié hier sur Transactiv-exe.org, Isabelle Vodjdani expliquait que l'exposition de la Cité des Sciences & de l'Industrie sur la Propriété Industrielle, qui a été ouverte au public hier et qui le restera jusqu'en février 2011, ne comporterai aucune référence au Libre, sur la demande de l'INPI.
Cet oubli n'était pourtant pas prémédité, puisqu'elle avait été contactée par la Cité des Sciences pour écrire et enregistrer un texte « définissant le Libre, ses enjeux et ses perspectives. Le texte devait être diffusé dans une petite zone de l’exposition équipée de bornes audio avec la version écrite affichée à proximité ». Mais ce texte a été retiré de l'exposition à la dernière minute sur demande expresse de l'INPI (l'Institut National de la Propriété Industrielle), principal sponsor de l'exposition.
Cet évènement intitulé « CONTREFAÇON, la vraie expo qui parle du faux » est donc tout entier consacré au contenu propriétaire et à ses déboires, oubliant les modèles alternatifs.
Interview d'Isabelle Vodjdani
Voici les réactions d'Isabelle Vodjdani, qui a accepté de répondre à nos questions. En plus d'être une fervente défenseuse du Libre, elle est une lectrice de PC INpact :
Quelle est ton implication dans le monde du libre ?
Je suis membre de Copyleft Attitude depuis sa création en 2000, et co-rédactrice de la Licence Art Libre (avec Antoine Moreau, artiste et initiateur de Copyleft_Attitude, Mélanie Clément-Fontaine et David Geraud, juristes). Mon implication est celle d'une artiste et d'une universitaire qui publie ses travaux avec la Licence Art Libre et qui utilise par ailleurs des logiciels libres dans son environnement de travail.
Peux-tu nous raconter comment et pourquoi la Cité des Sciences t’a contactée ?
La commissaire adjointe qui m'avait contactée en septembre disait être intéressée par ma double casquette d'artiste et d'universitaire. Elle avait sans doute repéré un article de vulgarisation que j'avais publié il y a quelques années sur les licences libres non logicielles (Comparatif de Licences Libres) et elle avait voulu s'adresser à quelqu'un qui aborde le sujet d'un point de vue qui englobe aussi les aspects culturels et politiques du libre. Sachant qu'elle ne pouvait consacrer qu'une toute petite portion de l'exposition à la question du libre, je suppose qu'elle a préféré s'adresser à une généraliste. Mais malheureusement, même cette petite portion lui a été finalement refusée.
Quelle a été ta réaction quand ils ont supprimé la partie "libre" de leur exposition ?
D'abord sidérée ! Sidérée par l'arrogance d'un partenaire qui traite les commissaires d'exposition comme des sous-traitants ou des employés. On est très loin du modèle du mécénat éclairé sur lequel comptent les institutions culturelles dites « publiques », désormais sommées de trouver leur propre financement pour survivre, et soumises de ce fait à des pressions s'exerçant de toutes part : les attentes de leur ministère de tutelle, celles du public, et les exigences de leurs sponsors. Il s'agit de professionnels qui connaissent leur travail, ils ont une conscience de leur mission, on devrait leur faire confiance pour concevoir et diriger un projet. Or ils se retrouvent complètement subordonnés aux exigences extravagantes d'un sponsor plus soucieux de propagande que d'honnêteté intellectuelle et de pédagogie. Je trouve cela dégradant pour eux et je compatis.
Pour ce qui est de mon texte, je ne m'étais jamais fait d'illusions, je savais qu'il passerait quasiment inaperçu dans le parcours de l'exposition. Néanmoins, j'avais accepté de le faire pour le principe, et parce que, sauf empêchement majeur, je ne refuse jamais une intervention sur le Libre lorsqu'on me sollicite. L'ironie, c'est qu'avec le scandale de cette censure, ce texte trouve un écho bien plus important que prévu.
À ton avis quelles raisons ont la Cité des Sciences ou l’INPI à censurer le monde du libre ?
La Cité des Sciences a toujours bien accueilli les manifestations liées au libre, la censure n'est pas de leur fait, même s'ils ont dû la mettre en application. Pour ce qui est de l'INPI, c'est une question qu'il faudra leur poser. A mon avis il s'agit d'une maladresse fatale, au sens où elle était prévisible, vu la position exacerbée des tenants du tout propriétaire face au modèle du libre. On sait bien que le Libre peut être producteur de richesses, mais pas dans le cadre de leur business-model. Bon, c'est leur boutique, ils ne vont pas lâcher le morceau de bon coeur, et il ne faut donc pas s'attendre à un comportement raisonnable de leur part.
Que comptes-tu faire pour leur faire changer d’avis ?
Je n'espère pas convaincre l'INPI, je préfère m'adresser aux oreilles qui entendent. Pour sa part, la Cité des Sciences a déjà une oreille attentive au libre, il faut seulement soutenir ceux qui y travaillent pour les encourager et les aider à résister aux pressions de sponsors abusifs. Pour cela, il faut que le public, les médias, les artistes, les blogueurs et les acteurs du libre expriment leur désapprobation face à cet acte de censure.
Merci.
Cet oubli n'était pourtant pas prémédité, puisqu'elle avait été contactée par la Cité des Sciences pour écrire et enregistrer un texte « définissant le Libre, ses enjeux et ses perspectives. Le texte devait être diffusé dans une petite zone de l’exposition équipée de bornes audio avec la version écrite affichée à proximité ». Mais ce texte a été retiré de l'exposition à la dernière minute sur demande expresse de l'INPI (l'Institut National de la Propriété Industrielle), principal sponsor de l'exposition.
Cet évènement intitulé « CONTREFAÇON, la vraie expo qui parle du faux » est donc tout entier consacré au contenu propriétaire et à ses déboires, oubliant les modèles alternatifs.
Interview d'Isabelle Vodjdani
Voici les réactions d'Isabelle Vodjdani, qui a accepté de répondre à nos questions. En plus d'être une fervente défenseuse du Libre, elle est une lectrice de PC INpact :
Quelle est ton implication dans le monde du libre ?
Je suis membre de Copyleft Attitude depuis sa création en 2000, et co-rédactrice de la Licence Art Libre (avec Antoine Moreau, artiste et initiateur de Copyleft_Attitude, Mélanie Clément-Fontaine et David Geraud, juristes). Mon implication est celle d'une artiste et d'une universitaire qui publie ses travaux avec la Licence Art Libre et qui utilise par ailleurs des logiciels libres dans son environnement de travail.
Peux-tu nous raconter comment et pourquoi la Cité des Sciences t’a contactée ?
La commissaire adjointe qui m'avait contactée en septembre disait être intéressée par ma double casquette d'artiste et d'universitaire. Elle avait sans doute repéré un article de vulgarisation que j'avais publié il y a quelques années sur les licences libres non logicielles (Comparatif de Licences Libres) et elle avait voulu s'adresser à quelqu'un qui aborde le sujet d'un point de vue qui englobe aussi les aspects culturels et politiques du libre. Sachant qu'elle ne pouvait consacrer qu'une toute petite portion de l'exposition à la question du libre, je suppose qu'elle a préféré s'adresser à une généraliste. Mais malheureusement, même cette petite portion lui a été finalement refusée.
Quelle a été ta réaction quand ils ont supprimé la partie "libre" de leur exposition ?
D'abord sidérée ! Sidérée par l'arrogance d'un partenaire qui traite les commissaires d'exposition comme des sous-traitants ou des employés. On est très loin du modèle du mécénat éclairé sur lequel comptent les institutions culturelles dites « publiques », désormais sommées de trouver leur propre financement pour survivre, et soumises de ce fait à des pressions s'exerçant de toutes part : les attentes de leur ministère de tutelle, celles du public, et les exigences de leurs sponsors. Il s'agit de professionnels qui connaissent leur travail, ils ont une conscience de leur mission, on devrait leur faire confiance pour concevoir et diriger un projet. Or ils se retrouvent complètement subordonnés aux exigences extravagantes d'un sponsor plus soucieux de propagande que d'honnêteté intellectuelle et de pédagogie. Je trouve cela dégradant pour eux et je compatis.
Pour ce qui est de mon texte, je ne m'étais jamais fait d'illusions, je savais qu'il passerait quasiment inaperçu dans le parcours de l'exposition. Néanmoins, j'avais accepté de le faire pour le principe, et parce que, sauf empêchement majeur, je ne refuse jamais une intervention sur le Libre lorsqu'on me sollicite. L'ironie, c'est qu'avec le scandale de cette censure, ce texte trouve un écho bien plus important que prévu.
À ton avis quelles raisons ont la Cité des Sciences ou l’INPI à censurer le monde du libre ?
La Cité des Sciences a toujours bien accueilli les manifestations liées au libre, la censure n'est pas de leur fait, même s'ils ont dû la mettre en application. Pour ce qui est de l'INPI, c'est une question qu'il faudra leur poser. A mon avis il s'agit d'une maladresse fatale, au sens où elle était prévisible, vu la position exacerbée des tenants du tout propriétaire face au modèle du libre. On sait bien que le Libre peut être producteur de richesses, mais pas dans le cadre de leur business-model. Bon, c'est leur boutique, ils ne vont pas lâcher le morceau de bon coeur, et il ne faut donc pas s'attendre à un comportement raisonnable de leur part.
Que comptes-tu faire pour leur faire changer d’avis ?
Je n'espère pas convaincre l'INPI, je préfère m'adresser aux oreilles qui entendent. Pour sa part, la Cité des Sciences a déjà une oreille attentive au libre, il faut seulement soutenir ceux qui y travaillent pour les encourager et les aider à résister aux pressions de sponsors abusifs. Pour cela, il faut que le public, les médias, les artistes, les blogueurs et les acteurs du libre expriment leur désapprobation face à cet acte de censure.
Merci.