Mise à jour 13 juillet 2009 : licence Légale, 3ème. L’ex-président du Conseil d’Aministration de la SACEM, Laurent Petitgirard évoque une nouvelle fois ses préférences pour un système de licence globale, version édulcorée. Il parle en son nom propre, mais difficile d'oublier le passé professionnel de l'intéressé. « Il ne s'agirait évidemment pas de légaliser l'échange sauvage de fichiers via le peer-to-peer, mais de fournir une licence qui donnerait accès à des sites de téléchargement correspondant aux différents fournisseurs d'accès et fournis en fichiers sains par les producteurs, où l'abonné pourrait télécharger toutes les œuvres qu'il voudrait », a-t-il expliqué dans le magazine du Conseil Général des Hauts-de-Seine.
L’idée serait d’imposer une taxe de 6 euros, payée pour moitié par l’abonné, pour l’autre, par le FAI. Avec 18 millions d'abonnés haut débit en France, les ayants droit pourraient percevoir 1,3 milliard d'euros par an, soit le double du marché actuel. Bien entendu, la SACEM ne monte pas encore trop ouvertement sur ce terrain puisque cela reviendrait à s’opposer frontalement à l’Hadopi et donc à Nicolas Sarkozy. Mais parions dès à présent que les assises dévoilées par Frédéric Mitterrand seront le terreau parfait pour planter cette graine-là, une fois Hadopi 2 votée et appliquée.
Première diffusion lundi 06 avril 2009
ResMusica, site dédié à la musique classique a interrogé Laurent Petitgirard, compositeur, membre de l’Académie des Beaux-Arts, mais aussi président de la SACEM. Le personnage n’a pas abandonné les deux positions de la SACEM déjà exposées dans nos colonnes : d’une part, l’institution croit peu dans les effets bénéfiques de la loi en question pour améliorer la rémunération des auteurs et des créateurs. D’autre part, l’une des solutions à explorer maintenant est celle de la taxe sur les tuyaux, les FAI, ceux-ci étant accusés de profiter indûment de l’offre de musique pour engranger quantité d’abonnés.
Pour expliquer l’engagement de la SACEM dans la Hadopi, Laurent Petitgirard avance d’abord « qu’il était impossible pour la SACEM de ne pas s’associer à une concertation générale visant à sortir d’un système uniquement répressif idiot et inefficace. Depuis 2003, il y a eu seulement 50 procédures dont 17 sont allées à l’exécution pour des moyennes de 200 à 300 euros ».
49 pour être plus précis. Fin 2008, le personnage nous dévoilait dans un petit déjeuner presse que « sur les 49 affaires jugées, il y en a 7 sans constitution de partie civile, il y a 10 instructions en cours, et sur les 32 affaires jugées, 4 sont des relaxes (débouté ou nullité), et 9 n’arrivent à aucun règlement pour cause de débiteurs insolvables. Il reste 19 affaires. Voilà la répression impitoyable qui s’est exercée pour des milliards de fichiers ! Aucune peine de prison et des sommes extrêmement modestes. » Le très faible nombre de procédures en cours était expliqué par « une prudence pour éviter la logique de répression ». En profondeur, il faut surtout savoir que les procédures individuelles sont lourdes, risquées et donc coûteuses pour les budgets, exigeant qui plus est, des perquisitions pour monter des dossiers avec des vraies preuves. Bref, le chemin de croix.
Première conséquence pour la loi Hadopi : les auteurs vont payer
Dans l’interview à Resmusica, Petitgirard poursuit en torpillant la licence globale... tout en relativisant la portée de la loi Hadopi : « d’un autre côté, les idées de licence globale bafouaient le droit exclusif. Ceci dit, nous constatons que nous sommes devant une loi dont la première conséquence est que les auteurs auront le droit de payer pour un exercice de police, c’est-à-dire de rémunérer des sociétés spécialisées dans la recherche sur internet. Si nous repérons 5000 contrevenants, sur une adresse IP à un instant précis, ils recevront un message d’alerte, mais ne seront pas placés sous surveillance et retomberont aussitôt dans la masse des millions d’internautes. Pour recevoir le deuxième message, ils devront être « attrapés » une nouvelle fois… Quelle est la probabilité d’un recoupement à trois reprises sur l’ensemble des internautes ? » À demi-mot, Petitgirard confirme que la sanction Hadopienne sera aveugle et faussée.
Même si l'offre est triplée, les effets seront peu sensibles
« Ensuite, confirme Petitgirard, il faut constater une dévalorisation terrible de la musique sur internet, parce que les recettes publicitaires y sont faibles du fait de difficultés à capter l’attention ». C’est une attaque presque frontale contre les offres forfaitaires type Deezer ou Jiwa.fm qui, si elle rend heureux l’utilisateur, ne rend pas assez d’euros à la SACEM. Le couperet tombe alors : « donc, même si le téléchargement légal double ou triple grâce à cette loi, les effets seront peu sensibles ».
Terrible constat d’échec pour une loi qui n’est pas encore ratifiée ! « Depuis cinq ans, nous répartissons annuellement cinquante millions de moins au titre du disque, et en contrepartie deux millions ou deux millions et demi de plus grâce à internet. Il va donc falloir effectuer un suivi très actif et se poser d’autres questions. A titre personnel, ce qui n’engage donc pas la SACEM, je pense que nous arriverons à une nouvelle forme de licence où les utilisateurs, moyennant une majoration de leur abonnement à laquelle aura participé le fournisseur d’accès, auront accès à des fichiers fournis par l’ensemble des producteurs avec des fichiers sains et normés, assurant une parfaite traçabilité des ayants droit ».
Résumons : la loi Hadopi, loi aux effets aveugles contre bon nombre d’internautes, va peut-être doubler ou tripler le téléchargement légal notamment sur les plateformes d’écoutes en streaming, mais tout ce beau chantier qui aura coûter des millions aux contribuables, aux FAI et aussi aux sociétés d’auteurs (qui devront payer pour rémunérer leur « police privée » chargée de récolter les IP), tout cela ne rapportera pas grand-chose aux créateurs.
Les sites de streaming ne rapportent pas assez
Ce n’est rien d’autre que ce que répétaient en boucle les Bloche, Billard, Tardy et autres Mathus ou Paul à l’Assemblée, devant une Christine Albanel sourde. Pourtant, il suffisait de lire les chiffres pour 2008 de la SACEM où il était dit : « Les accords prometteurs et indispensables conclus avec certains exploitants (Musique Max/Orange, SFR, Illimythics, Deezer, Dailymotion…) sont néanmoins aujourd’hui incapables d’apporter aux auteurs des revenus conformes à la valeur résultant de l’exploitation de leurs œuvres. L’écart entre l’usage massif de la musique « dématérialisée » sur ces réseaux et le montant des revenus perçus par les auteurs est devenu intenable. »
Une taxe sur les FAI, toujours à l'esprit
Et sans surprise, la SACEM ressert donc le couvert de la taxe sur les FAI, ce fameux plan B qui galope dans la tête de la Société depuis bien des années. Bernard Myet, président du directoire de la Sacem, nous le disait début 2009 : « nous sommes favorables à Création et internet de manière à tenter de responsabiliser les internautes. Toutefois, nous avons de grands doutes sur la capacité - même si ça va avoir un effet positif - de nous permettre de récupérer le niveau de ressources qui a fondu du fait de la piraterie. Et c’est dans cette perspective, et du fait qu’après Création et Internet il va y avoir une analyse de l’évolution du marché, que nous nous positionnons ».
Dans un autre échange, le président du directoire de la SACEM nous évoquait encore plus ouvertement que « sur la partie Internet, les FAI sont arrivés à échapper à toute responsabilité juridique et financière alors qu’on sait bien que c’est sur la musique qu’ils ont fait tout leur développement. » Selon le président « le principe de base du droit d’auteur, [est que] toute personne qui exploite des œuvres protégées et en tire un bénéfice direct ou indirect doit contribuer à la rémunération des créateurs. ». Bref, les FAI qui se préparent à adapter leur réseau à l’usine Hadopi doivent dès à présent s’apprêter à goûter au plat de la taxe au profit des créateurs après celle sur l’audiovisuelle.
L’idée serait d’imposer une taxe de 6 euros, payée pour moitié par l’abonné, pour l’autre, par le FAI. Avec 18 millions d'abonnés haut débit en France, les ayants droit pourraient percevoir 1,3 milliard d'euros par an, soit le double du marché actuel. Bien entendu, la SACEM ne monte pas encore trop ouvertement sur ce terrain puisque cela reviendrait à s’opposer frontalement à l’Hadopi et donc à Nicolas Sarkozy. Mais parions dès à présent que les assises dévoilées par Frédéric Mitterrand seront le terreau parfait pour planter cette graine-là, une fois Hadopi 2 votée et appliquée.
Première diffusion lundi 06 avril 2009
ResMusica, site dédié à la musique classique a interrogé Laurent Petitgirard, compositeur, membre de l’Académie des Beaux-Arts, mais aussi président de la SACEM. Le personnage n’a pas abandonné les deux positions de la SACEM déjà exposées dans nos colonnes : d’une part, l’institution croit peu dans les effets bénéfiques de la loi en question pour améliorer la rémunération des auteurs et des créateurs. D’autre part, l’une des solutions à explorer maintenant est celle de la taxe sur les tuyaux, les FAI, ceux-ci étant accusés de profiter indûment de l’offre de musique pour engranger quantité d’abonnés.
Pour expliquer l’engagement de la SACEM dans la Hadopi, Laurent Petitgirard avance d’abord « qu’il était impossible pour la SACEM de ne pas s’associer à une concertation générale visant à sortir d’un système uniquement répressif idiot et inefficace. Depuis 2003, il y a eu seulement 50 procédures dont 17 sont allées à l’exécution pour des moyennes de 200 à 300 euros ».
49 pour être plus précis. Fin 2008, le personnage nous dévoilait dans un petit déjeuner presse que « sur les 49 affaires jugées, il y en a 7 sans constitution de partie civile, il y a 10 instructions en cours, et sur les 32 affaires jugées, 4 sont des relaxes (débouté ou nullité), et 9 n’arrivent à aucun règlement pour cause de débiteurs insolvables. Il reste 19 affaires. Voilà la répression impitoyable qui s’est exercée pour des milliards de fichiers ! Aucune peine de prison et des sommes extrêmement modestes. » Le très faible nombre de procédures en cours était expliqué par « une prudence pour éviter la logique de répression ». En profondeur, il faut surtout savoir que les procédures individuelles sont lourdes, risquées et donc coûteuses pour les budgets, exigeant qui plus est, des perquisitions pour monter des dossiers avec des vraies preuves. Bref, le chemin de croix.
Première conséquence pour la loi Hadopi : les auteurs vont payer
Dans l’interview à Resmusica, Petitgirard poursuit en torpillant la licence globale... tout en relativisant la portée de la loi Hadopi : « d’un autre côté, les idées de licence globale bafouaient le droit exclusif. Ceci dit, nous constatons que nous sommes devant une loi dont la première conséquence est que les auteurs auront le droit de payer pour un exercice de police, c’est-à-dire de rémunérer des sociétés spécialisées dans la recherche sur internet. Si nous repérons 5000 contrevenants, sur une adresse IP à un instant précis, ils recevront un message d’alerte, mais ne seront pas placés sous surveillance et retomberont aussitôt dans la masse des millions d’internautes. Pour recevoir le deuxième message, ils devront être « attrapés » une nouvelle fois… Quelle est la probabilité d’un recoupement à trois reprises sur l’ensemble des internautes ? » À demi-mot, Petitgirard confirme que la sanction Hadopienne sera aveugle et faussée.
Même si l'offre est triplée, les effets seront peu sensibles
« Ensuite, confirme Petitgirard, il faut constater une dévalorisation terrible de la musique sur internet, parce que les recettes publicitaires y sont faibles du fait de difficultés à capter l’attention ». C’est une attaque presque frontale contre les offres forfaitaires type Deezer ou Jiwa.fm qui, si elle rend heureux l’utilisateur, ne rend pas assez d’euros à la SACEM. Le couperet tombe alors : « donc, même si le téléchargement légal double ou triple grâce à cette loi, les effets seront peu sensibles ».
Terrible constat d’échec pour une loi qui n’est pas encore ratifiée ! « Depuis cinq ans, nous répartissons annuellement cinquante millions de moins au titre du disque, et en contrepartie deux millions ou deux millions et demi de plus grâce à internet. Il va donc falloir effectuer un suivi très actif et se poser d’autres questions. A titre personnel, ce qui n’engage donc pas la SACEM, je pense que nous arriverons à une nouvelle forme de licence où les utilisateurs, moyennant une majoration de leur abonnement à laquelle aura participé le fournisseur d’accès, auront accès à des fichiers fournis par l’ensemble des producteurs avec des fichiers sains et normés, assurant une parfaite traçabilité des ayants droit ».
Résumons : la loi Hadopi, loi aux effets aveugles contre bon nombre d’internautes, va peut-être doubler ou tripler le téléchargement légal notamment sur les plateformes d’écoutes en streaming, mais tout ce beau chantier qui aura coûter des millions aux contribuables, aux FAI et aussi aux sociétés d’auteurs (qui devront payer pour rémunérer leur « police privée » chargée de récolter les IP), tout cela ne rapportera pas grand-chose aux créateurs.
Les sites de streaming ne rapportent pas assez
Ce n’est rien d’autre que ce que répétaient en boucle les Bloche, Billard, Tardy et autres Mathus ou Paul à l’Assemblée, devant une Christine Albanel sourde. Pourtant, il suffisait de lire les chiffres pour 2008 de la SACEM où il était dit : « Les accords prometteurs et indispensables conclus avec certains exploitants (Musique Max/Orange, SFR, Illimythics, Deezer, Dailymotion…) sont néanmoins aujourd’hui incapables d’apporter aux auteurs des revenus conformes à la valeur résultant de l’exploitation de leurs œuvres. L’écart entre l’usage massif de la musique « dématérialisée » sur ces réseaux et le montant des revenus perçus par les auteurs est devenu intenable. »
Une taxe sur les FAI, toujours à l'esprit
Et sans surprise, la SACEM ressert donc le couvert de la taxe sur les FAI, ce fameux plan B qui galope dans la tête de la Société depuis bien des années. Bernard Myet, président du directoire de la Sacem, nous le disait début 2009 : « nous sommes favorables à Création et internet de manière à tenter de responsabiliser les internautes. Toutefois, nous avons de grands doutes sur la capacité - même si ça va avoir un effet positif - de nous permettre de récupérer le niveau de ressources qui a fondu du fait de la piraterie. Et c’est dans cette perspective, et du fait qu’après Création et Internet il va y avoir une analyse de l’évolution du marché, que nous nous positionnons ».
Dans un autre échange, le président du directoire de la SACEM nous évoquait encore plus ouvertement que « sur la partie Internet, les FAI sont arrivés à échapper à toute responsabilité juridique et financière alors qu’on sait bien que c’est sur la musique qu’ils ont fait tout leur développement. » Selon le président « le principe de base du droit d’auteur, [est que] toute personne qui exploite des œuvres protégées et en tire un bénéfice direct ou indirect doit contribuer à la rémunération des créateurs. ». Bref, les FAI qui se préparent à adapter leur réseau à l’usine Hadopi doivent dès à présent s’apprêter à goûter au plat de la taxe au profit des créateurs après celle sur l’audiovisuelle.