
Cette commission est composée de trois membres. Un membre « en activité » du Conseil d’État, plus haute juridiction administrative. Un autre, toujours en activité, de la Cour de cassation. Et un membre en activité de la Cour des comptes. L’un des trois est président de cette commission, après tirage au sort.
Travaillons à la chaîne pour sanctionner plus rapidement
On se souvient qu’hier le cabinet de la ministre qualifiait la Quadrature du net de « cinq gus dans un garage qui font des mails à la chaîne ». Un moment épique qui fut aussi une manière de jeter de la boue sur le travail du collectif citoyen face à un texte qui recèle de nombreuses zones d’ombres.
Mais revenons sur notre Commission, car là aussi, ça sent le gas-oil et l’email à la chaîne.
Selon les chiffres fournis plusieurs fois par la ministre Albanel, le projet sera calibré pour décider jusqu’à 1000 sanctions par jour prises par un collège de trois personnes. Si l’on compte 7 heures de travail effectives, cela représente 333 décisions par jour et 47,57 décisions par heure et par juge. Soit un peu plus d’une minute par dossier. Une productivité qui aurait motivé dans la seconde, une analyse anti-EPO sur le Tour de France.
1000 décisions par jour, une décision en 25,20 secondes
Et si l’on rapporte tout cela au collège (les décisions sont collégiales) ces 1000 décisions par jour ou 142,85 décisions par heure représentent 25,20 secondes par décision. « Avec des adresses en IPv6 c'est un exploit déjà que de lire le relevé d'identification dans ce temps... » nous pointe avec justesse un lecteur, montre en main.
Mais la lecture de l'adresse IP n'est pas tout. À ces 1000 décisions par jour, qui prennent déjà de précieuses secondes aux trois magistrats, il faut ajouter ce fameux principe du contradictoire que cherche à respecter scrupuleusement le projet Création et internet.
L'heure est aussi au respect du contradictoire
Avant toute décision de suspension, d’injonction de mettre un logiciel ou cadenas numérique sur la machine de l’abonné ou d’opter pour le ralentissement des débits, un échange contradictoire aura lieu avec l’abonné. Le droit européen, notamment, l'exige dans la convention européenne des droits de l'Homme.
Dans ce laps de temps, l'abonné assurera sa défense et tentera de démontrer comme il pourra, que si son IP a été repérée sur les réseaux P2P, c’est parce que sa box a été piratée par un tiers, par exemple... Une preuve déjà pas facile à rapporter, qui devient surnaturelle dans ces fameuses 25,20 secondes.
Avec le projet Création et Internet, autant dire qu’en une seule journée d’activité, le système sera totalement écroulé par le poids de cette usine à décisions. Et on voudrait rendre transparente cette structure par suffocation, on ne s'y prendrait pas autrement.