
Le ministère de l’Éducation et celui de l’Enseignement supérieur suivent l'exemple. Ils viennent de publier un appel d’offres portant « sur la veille de l’opinion dans les domaines de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche ».
Dans le cahier des charges, les termes sont clairs : « l’analyse permettra un suivi précis de l’évolution de l’opinion internaute et des arguments émergents relayés et commentés sur ce canal. » L’heureuse entreprise qui remportera le marché devra :
- Identifier les thèmes stratégiques (pérennes, prévisibles ou émergents)
- Identifier et analyser les sources stratégiques ou structurant l’opinion
- Repérer les leaders d’opinion, les lanceurs d’alerte et analyser leur potentiel d’influence et leur capacité à se constituer en réseau
- Décrypter les sources des débats et leurs modes de propagation
- Repérer les informations signifiantes (en particulier les signaux faibles)
- Suivre les informations signifiantes dans le temps
- Relever des indicateurs quantitatifs (volume des contributions, nombre de commentaires, audience, etc.)
- Rapprocher ces informations et les interpréter
- Anticiper et évaluer les risques de contagion et de crise
- Alerter et préconiser en conséquence
Ne pas rater le buzz, un marché à 220 000 euros
Des distinctions subtiles, mais qui reviennent un peu à la même chose : savoir ce qui se dit sur le web, tendre l’oreille pour sentir le vent numérique et avoir le nez pour déminer les crises avant l’explosion.
Et tout cela a un coût pour le budget – serré –. Montant de ces marchés ? 220 000 euros hors-taxe, dont 100 000 euros pour le ministère de l’Éducation, et 120 000 pour celui de l’Enseignement supérieur, et ce, pour la seule année 2009 (Le contrat pourra être renouvelé une fois)
Depuis que l'information circule sur le web, le gouvernement tente de désamorcer ce dossier : « Cet appel d'offres n'est pas une nouveauté. C'est renouvelé chaque année depuis 2006. Tous les grands ministères ont une veille média et internet et ça fait partie des missions déléguées à la direction de la communication » explique le ministère de l’Éducation nationale dans une dépêche AP. « [nous considérons] que ça peut l'aider à se forger une opinion sur l'évolution de la situation. Et on est obligé d'inclure dans l'appel d'offres tout le développement des médias internet »
Discrétion de rigueur
Reste que le plus piquant dans le cahier des charges est l’obligation de discrétion qui pèsera sur l’entreprise à la tête de ce marché public :
10.2 Obligations de discrétion
Le titulaire ainsi que son personnel sont tenus à une obligation de discrétion pour tout ce qui concerne les faits, informations et documents dont ils ont connaissance. Ils s’interdisent notamment toute communication écrite ou verbale sur ces sujets et toute remise de documents à des tiers sans l’accord écrit et préalable de l’administration.
Le titulaire ainsi que son personnel sont tenus à une obligation de discrétion pour tout ce qui concerne les faits, informations et documents dont ils ont connaissance. Ils s’interdisent notamment toute communication écrite ou verbale sur ces sujets et toute remise de documents à des tiers sans l’accord écrit et préalable de l’administration.
Ne pas communiquer sur ce qui boucle, buzz et retentit se le web, c’est là un beau paradoxe.Toujours selon le cahier des charges, la « clé de voûte du dispositif de veille, le passage en « mode alerte » visera à transmettre systématiquement les informations stratégiques ou les signaux faibles susceptibles de monter de manière inhabituellement accélérée ».
Le web, une caisse de résonance
A titre de site bienfaiteur de l’intérêt général et d’adversaire de la pression fiscale, nous pouvons d’ores et déjà assurer une prestation gratuite au profit de ce noble projet en pointant cette vidéo qui tourne à vive allure. On y surveillera les propos tenus par Gérard Longuet, sénateur UMP et rapporteur spécial de la commission des finances du Sénat à l'enseignement scolaire.
C’était d’ailleurs lors de cette rencontre que Xavier Darcos, ministre de l’Éducation avait donné sa définition aiguisée d’un enseignant de maternelle (« personnes dont la fonction va être essentiellement de faire faire des siestes à des enfants ou de leur changer les couches »).