Loi renseignement : des avocats franco-américains dénoncent la PPL sur la surveillance internationale

Loi renseignement : des avocats franco-américains dénoncent la PPL sur la surveillance internationale

Des inquiétudes ravivées par la proposition de loi Adam

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Marc Rees

Publié dans

Droit

15/09/2015 5 minutes
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Loi renseignement : des avocats franco-américains dénoncent la PPL sur la surveillance internationale

Ils s’étaient déjà plaints de la loi Renseignement auprès du Conseil constitutionnel puis de Manuel Valls. Des avocats franco-américains remettent le couvert à l’encontre de la toute récente proposition de loi sur la surveillance internationale. Next INpact diffuse la lettre qu’ils viennent d’adresser à Patricia Adam, présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Cette « PPL » - analysée ligne par ligne dans notre article - a été déposée suite à la censure partielle du Conseil constitutionnel de la loi Renseignement. Pourquoi ? Car l’article censé encadrer les activités des services spécialisés au-delà de nos frontières renvoyait à un décret le soin de fixer les modalités d’exploitation, de conservation et de destruction des renseignements collectés. Un renvoi inconstitutionnel, selon les sages de la rue de Montpensier pour qui le législateur aurait dû consommer la plénitude de ses compétences.

Après cette censure, la French American Bar Association avait sollicité de Manuel Valls le retrait du décret secret d’avril 2008 sur l’espionnage international. Ce texte administratif, jamais publié, avait été révélé par un article de l’Obs du 1er juillet 2015. Leur missive est cependant restée sans réponse. Pire, la lecture de la proposition de loi, destinée à combler les lacunes de la loi renseignement, n’a pas éteint leurs inquiétudes.

Le 11 septembre 2015, Pierre Ciric et Thomas Vandenabeele, vice-président et président de la FABA, ont en effet adressé ce courrier à la députée, coauteure avec Philippe Nauche de la proposition de loi sur la surveillance internationale. Ce document, qui nous a été révélé par un conseiller consulaire, remet à jour leurs critiques à l’aulne des dispositions de la proposition de loi.

Une rupture d'égalité manifeste selon la FABA

En substance, selon eux, la PPL menace l’obligation de confidentialité pour les avocats situés hors du territoire national. L’affirmation doit faire l’objet d’une petite explication juridique : la loi sur le renseignement interdit la surveillance des magistrats, journalistes, parlementaires et avocats du moins s’agissant de l’exercice de leur mandat ou de leur profession. Le futur article L.854-1-.III, programmé dans le Code de la sécurité par la PPL, étend cette disposition à l’étranger.

Seulement, la FABA craint que cette mesure ne vaille que pour les Français, non par exemple pour les avocats étrangers, et notamment américains : « seuls sont protégés des techniques de renseignement (…) des avocats qui exercent en France uniquement. Par conséquent, les avocats présents en dehors du territoire national sont automatiquement soumis à ces techniques ». Or, ceux-ci sont de plus en plus appelés à gérer des dossiers confiés par des clients installés en France. Et pour eux, ce trou dans la raquette « serait de nature à annihiler le sacrosaint « secret professionnel » au-delà de l’encadrement judiciaire pourtant déjà existant, et affecterait l’intégrité de l’ « attorney-client privilege » américain et du secret professionnel imposé par les barreaux français, si la proposition de loi sur le renseignement était votée par le parlement ».

Il y a donc un déficit de confiance pour ces avocats du seul fait de leur statut d’étranger. La FABA dénonce une atteinte au principe d’égalité entre les avocats selon leur lieu de localisation « alors qu’il n’existe aucune différence appréciable de situations entre les deux catégories de façon objective, et qu’il n’existe aucune nécessité d’intérêt général pour distinguer ces deux groupes ». L’affirmation qui surfe sur les critères définis par le Conseil constitutionnel, est suivie d’une pluie de constats : « les avocats présents hors du territoire national ne représentent objectivement aucune menace distincte sur l’ordre public par rapport aux confrères présents sur le territoire national, ils ne font pas l’objet de poursuites civiles ou pénales plus accentuées que leurs confrères sur le territoire national. »

Une proposition de rustine

Dans la même veine, la proposition de loi n’est pas plus bavarde que la loi sur le renseignement : on ne sait par exemple si la protection de l’avocat profite uniquement à ceux inscrits auprès d’un barreau français et exerçant en France, ou bien vaut pour tous ceux exerçant en France, etc. Bref, pour la FABA, la PPL doit être rapidement corrigée. L’association suggère ainsi une piste de travail :

« Les personnes qui exercent en France ou à l’étranger un mandat ou une profession mentionné à l’article L. 821-7, sous l’autorité de l’État français ou d’un État étranger, ne peuvent faire l’objet d’une surveillance individuelle de leurs communications à raison de l’exercice du mandat ou de la profession concernée. »

Le texte sera discuté en commission de la Défénse demain à partir de 11h30, pour ensuite être débattu en séance sans doute d’ici la fin du mois.

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Écrit par Marc Rees

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Une rupture d'égalité manifeste selon la FABA

Une proposition de rustine

Le brief de ce matin n'est pas encore là

Partez acheter vos croissants
Et faites chauffer votre bouilloire,
Le brief arrive dans un instant,
Tout frais du matin, gardez espoir.

Commentaires (24)


De toute manière a partir du moment ou les moyens sont la et que la vérification est impossible…

 

 ‘oh excusez, c’était un erreur !’

 

 Le secret médical est tout autant bafoué, et c’est bien plus préoccupant.


Bah bravo, on alourdit bien le texte pour rien.



« Les personnes qui exercent en France ou à l’étranger un mandat ou une profession mentionné à l’article L. 821-7, sous l’autorité de l’État français ou d’un État étranger,

ne peuvent faire l’objet d’une surveillance individuelle de leurs

communications à raison de l’exercice du mandat ou de la profession

concernée. »

 

 

Sous l’autorité de l’Etat, mes couilles. On a des journalistes d’Etat, des avocats d’Etat ?

 



Sinon, excellente idée. Ce serait dommage d’exposer l’excellent Karim Achoui à la surveillance.


Je comprends toujours pas que dans le pays de l’égalité (soi disant) on puisse dispenser une catégorie de gens…








Obidoub a écrit :



Je comprends toujours pas que dans le pays de l’égalité (soi disant) on puisse dispenser une catégorie de gens…





Parce que le secret de l’instruction, le secret professionnel, le secret des sources, sont indispensables à un État de droit, et que s’ils sont bafoués, on peut s’attendre à des entraves à la justice, à la liberté de la presse, etc…



Donc même si dans l’absolu, tout le monde devrait avoir le droit à la communication privée, certains en ont plus besoin que d’autres.



Le chiffrage, il n’y a que ça de vrai. Les mathématiques tiennent toujours, et elles peuvent être appliqué à l’ensemble des communications (orales / écrites). 

&nbsp;Sinon, rendez-vous dans un parking souterrain.&nbsp;<img data-src=" />








Obidoub a écrit :



Je comprends toujours pas que dans le pays de l’égalité (soi disant) on puisse dispenser une catégorie de gens…





Les dispenses, exceptions, passe-droits et autres privilèges sont les leges privatae modernes accordés par la caste au pouvoir pour récompenser leurs clients-électeurs et conserver leur cartel politique.



Il est grand temps d’inverser ce système, et le meilleur moyen pour conserver sa vie privée et de les contourner est d’utiliser la technologie.





Ultimately, if people lose their willingness to recognize that there are times in our history when legality becomes distinct from morality, we aren’t just ceding control of our rights to government, but our agency in determing their futures.



How does this relate to politics? Well, I suspect that governments today are more concerned with the loss of their ability to control and regulate the behavior of their citizens than they are with their citizens’ discontent.



How do we make that work for us? We can devise means, through the application and sophistication of science, to remind governments that if they will not be responsible stewards of our rights, we the people will implement systems that provide for a means of not just enforcing our rights, but removing from governments the ability to interfere with those rights.



You can see the beginnings of this dynamic today in the statements of government officials complaining about the adoption of encryption by major technology providers. The idea here isn’t to fling ourselves into anarchy and do away with government, but to remind the government that there must always be a balance of power between the governing and the governed, and that as the progress of science increasingly empowers communities and individuals, there will be more and more areas of our lives where – if government insists on behaving poorly and with a callous disregard for the citizen – we can find ways to reduce or remove their powers on a new – and permanent – basis.



Our rights are not granted by governments. They are inherent to our nature. But it’s entirely the opposite for governments: their privileges are precisely equal to only those which we suffer them to enjoy.



We haven’t had to think about that much in the last few decades because quality of life has been increasing across almost all measures in a significant way, and that has led to a comfortable complacency. But here and there throughout history, we’ll occasionally come across these periods where governments think more about what they “can” do rather than what they “should” do, and what is lawful will become increasingly distinct from what is moral.



In such times, we’d do well to remember that at the end of the day, the law doesn’t defend us; we defend the law. And when it becomes contrary to our morals, we have both the right and the responsibility to rebalance it toward just ends.”




  • Edward Snowden, 2015



Quand les agriculteurs décident de bloquer le pays, on leur met à disposition des compagnies de gendarmerie pour “leur sécurité” et au final on retire un texte qui n’aurait pas eu tant de répercussions que ça, idem pour les taxis, idem pour quasiment tout ce qui n’a pas d’importance, quand l’état met en place 1984, contre l’avis général de la “société civile” alors là on peut aller se faire voir… :| pauvre pays :‘(








MuadJC a écrit :



une actu à venir sur Nxi?

http://www.lemonde.fr/pixels/article/2015/09/15/jean-marie-delarue-ecarte-du-con…





Oui sans doute.&nbsp; je dois purger plusieurs sujets d’abord.





Ils s’étaient déjà plaints de la loi Renseignement&nbsp;auprès du Conseil constitutionnel puis de Manuel Valls.



&nbsp;

&nbsp;Ok, next news <img data-src=" />

&nbsp;

&nbsp;





blob741 a écrit :



On a des journalistes d’Etat, des avocats d’Etat ?





Tu connais Elkabbach, Pernaut, Pujadas ?

edit : ah pardon, tu parlais de journalistes<img data-src=" />









ActionFighter a écrit :



Parce que le secret de l’instruction, le secret professionnel, le secret des sources, sont indispensables à un État de droit, et que s’ils sont bafoués, on peut s’attendre à des entraves à la justice, à la liberté de la presse, etc…



Donc même si dans l’absolu, tout le monde devrait avoir le droit à la communication privée, certains en ont plus besoin que d’autres.





Sauf que dans le cas présent on écoute bien tout le monde, et c’est seulement après avoir écouté la personne que l’on cherche son identité… … pour enfin se rendre éventuellement compte que l’écoute ne peut être retenue à charge contre la personne. En bref, l’écoute a bien eu lieu et le secret professionnel a bien été bafoué.









kwak-kwak a écrit :



Sauf que dans le cas présent on écoute bien tout le monde, et c’est seulement après avoir écouté la personne que l’on cherche son identité… … pour enfin se rendre éventuellement compte que l’écoute ne peut être retenue à charge contre la personne. En bref, l’écoute a bien eu lieu et le secret professionnel a bien été bafoué.





C’est bien le problème oui <img data-src=" />



Et là, on parle de communications internationales, mais ça vaut aussi pour les nationales. Et sur le sujet, le CC a bien botté en touche…









ActionFighter a écrit :



Parce que le secret de l’instruction, le secret professionnel, le secret des sources, sont indispensables à un État de droit, et que s’ils sont bafoués, on peut s’attendre à des entraves à la justice, à la liberté de la presse, etc…



Donc même si dans l’absolu, tout le monde devrait avoir le droit à la communication privée, certains en ont plus besoin que d’autres.





“un État de droit”&nbsp;<img data-src=" />&nbsp;&nbsp;<img data-src=" />



Il faudrait alors que les professionnels déclarent leur numéro et leur courriel professionnel.

&nbsp;



C’est pas impossible, les avocats notamment ont un ordre avec cotisation annuelle. Il suffit demander de renseigner obligatoirement ces informations lors de la prochaine cotisation. En 2 ans, cela peut-être réglé (ce qui n’empêche que cela demande de la ressource pour expliquer cela à ses adhérents et relancer les récalcitrants).

&nbsp;



Après, cela marche bien avec l’ordre national, mais je vois mal comment on pourrait connaître le courriel de l’ensemble des avocats de la planète.

&nbsp;



&nbsp;Après quand on voit l’incompétence du Barreau sur le numériquehttps://cuifavocats.com/le-rpva-ou-en-est-on/ ) qui n’a d’égale que la nullité des services informatiques proposés au tribunaux (les systèmes plantent tout le temps), tu te dit que la demande de ces avocats n’est que dans une optique de procès (pas avoir trop de charges contre nous) et qu’ils pourraient se mettre à la pratique.








Soriatane a écrit :



Il faudrait alors que les professionnels déclarent leur numéro et leur courriel professionnel.

 



C’est pas impossible, les avocats notamment ont un ordre avec cotisation annuelle. Il suffit demander de renseigner obligatoirement ces informations lors de la prochaine cotisation. En 2 ans, cela peut-être réglé (ce qui n’empêche que cela demande de la ressource pour expliquer cela à ses adhérents et relancer les récalcitrants).

 



Après, cela marche bien avec l’ordre national, mais je vois mal comment on pourrait connaître le courriel de l’ensemble des avocats de la planète.

 



 Après quand on voit l’incompétence du Barreau sur le numériquehttps://cuifavocats.com/le-rpva-ou-en-est-on/ ) qui n’a d’égale que la nullité des services informatiques proposés au tribunaux (les systèmes plantent tout le temps), tu te dit que la demande de ces avocats n’est que dans une optique de procès (pas avoir trop de charges contre nous) et qu’ils pourraient se mettre à la pratique.







Oui, il existe une RFC qui propose de rajouter un bit dans chaque paquet d’octet, pour indiquer si ce paquet peut être espionné ou non (mais jme souviens plus de la référence).



Je vois pas les espions se baser sur un RFC pour espionner ou pas.

Ils vont espionner par défaut à moins que leur donne la preuve par une identification forte du récepteur ou de l’émetteur.

&nbsp;



Sinon, tout le monde mettra ce bit dans chaque paquets pour demander à ne pas être espionner. Bref, on en revient au problème du Do Not Track: purement déclaratif qui n’engage que ceux qui y croient ou sont de bonnes volontés.








Soriatane a écrit :



Je vois pas les espions se baser sur un RFC pour espionner ou pas.

Ils vont espionner par défaut à moins que leur donne la preuve par une identification forte du récepteur ou de l’émetteur.

 



Sinon, tout le monde mettra ce bit dans chaque paquets pour demander à ne pas être espionner. Bref, on en revient au problème du Do Not Track: purement déclaratif qui n’engage que ceux qui y croient ou sont de bonnes volontés.







La RFC en question a surtout pour but de démontrer la débilité de cette idée.



Quand à ton idée d’identification forte, euh, j’ai du mal à te suivre : tu critiques le do not track pake c’est déclaratif, mais en quoi cette identification forte serait autre chose que déclarative ?



Moi j’utilise un VPN suisse. Comme ça je ne suis pas concerné par la loi renseignement. C’est https://itis4u.ch/fr








Obidoub a écrit :



Je comprends toujours pas que dans le pays de l’égalité (soi disant) on puisse dispenser une catégorie de gens…





Normal, parmi les politiciens, il y a beaucoup d’avocats ! <img data-src=" />

&nbsp;



Et, parmi les clients des avocats, plein de politiciens ! <img data-src=" />

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On ne va pas toucher aux copains des copains, hein !?









vince120 a écrit :



Quand les agriculteurs décident de bloquer le pays, on leur met à disposition des compagnies de gendarmerie pour “leur sécurité” et au final on retire un texte qui n’aurait pas eu tant de répercussions que ça, idem pour les taxis, idem pour quasiment tout ce qui n’a pas d’importance, quand l’état met en place 1984, contre l’avis général de la “société civile” alors là on peut aller se faire voir… :| pauvre pays :‘(



Quand j’en parle autour de moi, et quelque sot le niveau professionnel, on me répond “me prends pas la tête, j’ai ma petite vie tranquille, moi” ou “t’y connais rien, les élus savent ce qu’ils font”.

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Cela donne une idée de l’utilité du droit de vote et du pourquoi ça s’enrichit, vole, viole, fait tuer ou emprisonner, magouille, dépense sans compter, ment en toute impunité chez les élites.



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Frenchouille a écrit :



Moi j’utilise un VPN suisse. Comme ça je ne suis pas concerné par la loi renseignement. C’est https://itis4u.ch/fr







Au contraire, en étant d’apparence suisse, tu passes dans la catégorie open bar ou ils peuvent faire ce qu’ils veulent sans devoir passer par la CNTR.









Frenchouille a écrit :



Moi j’utilise un VPN suisse. Comme ça je ne suis pas concerné par la loi renseignement. C’est https://itis4u.ch/fr









eliumnick a écrit :



Au contraire, en étant d’apparence suisse, tu passes dans la catégorie open bar ou ils peuvent faire ce qu’ils veulent sans devoir passer par la CNTR.





Et la loi oblige ton opérateur VPN a donner la clé de chiffrement à l’état français. Et s’ils veulent pas, les services de renseignement ont toute latitude pour les récupérer eux-mêmes.



Si une identification forte (faite avec des certificats signés par une structure de l’État français) est indiqué dans les entêtes, les services secrets ne peuvent pas l’ignorer sans se désavouer.

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Concrètement je pense à la messagerie sécurisée de santé qui se base sur SMTP et qui utilise des cartes à puces et chiffre le flux:&nbsp; https://www.mssante.fr/

Je connais pas tous les détails techniques, mais un espion français déchiffrant ses flux ne peux ignorer que cela concerne la santé et qu’il y a des clés signées par certificats de l’État français.