Le projet de loi Macron n’a pas trouvé de terrain d’arbitrage entre la version votée par les sénateurs et celles des députés. Résultat des courses, le texte revient à partir d’aujourd’hui en commission à l’Assemblée nationale. Là, des parlementaires s’opposent bec et ongles à l’amendement visant à réguler davantage les moteurs de recherches, du moins dans sa logique actuelle.
En avril dernier, les sénateurs avaient voté l’amendement dit anti-Google. Déposé par trois présidents de commission au Sénat, l’UDI Catherine Morin-Desailly (Culture), les UMP Jean Bizet (Affaires européennes) et Jean-Claude Lenoir (Affaires économiques), ainsi que par les sénateurs Bruno Retailleau (UMP) et Chantal Jouanno (UDI), le texte a une logique simple : dès lors qu’un moteur a « un effet structurant sur le fonctionnement de l’économie numérique », il est contraint à une série d’obligations.
Et si Google faisait de la pub pour Bing ?
Quelles obligations ? Citons afficher sur sa page d’accueil de liens vers trois autres moteurs de recherche « sans lien juridique avec cet exploitant ». Détailler les « principes généraux de classement ou de référencement proposés », en imposant une obligation générale de « loyauté » et de non-discrimination, sans que soient favorisés « ses propres services ou ceux de toute autre entité ayant un lien juridique avec lui ». Enfin, s’interdire d’obliger « un tiers proposant des solutions logicielles ou des appareils de communications électroniques à utiliser, de façon exclusive, ledit moteur de recherche pour accéder à Internet ». Pour les contrevenants, ces obligations seraient alors sanctionnées lourdement par l’ARCEP, avec une amende pouvant être portée à 10 % du chiffre d’affaires mondial.
Selon Catherine Morin-Desailly, l’enjeu est de protéger nos acteurs face aux géants, au hasard américains. « Il y a aujourd’hui des abus de position dominante qui se conjuguent avec la question des données personnelles, lesquelles permettent d’affiner encore et toujours plus le marketing et l’orientation des consommateurs sur la Toile, tout cela en générant de plus en plus de bénéfice et sapant l’action publique ». « Doit-on être demain les acteurs ou les simples consommateurs de cet agenda numérique ? » se demande-t-elle.
L’opposition du gouvernement, un possible plan B
L'enjeu de cet amendement est aussi de faire sortir l’exécutif du bois. Comment celui-ci qui n’a cessé de critiquer les positions des géants américains allait-il s’y opposer ? Lors des débats au Sénat, justement, le gouvernement s’est montré très tiède à l’idée de voir voter une telle disposition. Au Sénat, Emmanuel Macron y a vu une « atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre ». Selon lui, « ce serait comme demander à Renault de faire de la publicité pour Peugeot sur ses pare-brise ». Au surplus, confier le képi à l’ARCEP n’est pas judicieux puisque le problème est concurrentiel, non sectoriel. Enfin, ce dossier est sur le feu à Bruxelles et ces dispositions ne sont pas opérantes puisque Google n’est qu’une régie en France.
D’après le ministre de l’Économie, il serait d’ailleurs plus opportun de jouer sur le levier du droit de la consommation. « La loi du 17 mars 2014 donne une base : l'article L. 111-5 du code de la consommation sur les comparateurs de prix ayant un siège en France. Plutôt que de réguler les plateformes, donnons aux consommateurs la possibilité de faire valoir leurs droits. Lançons et multiplions les contrôles. »
Comme révélé vendredi, le Gouvernement a dans ses cartons un amendement visant à muscler ces règles issues du droit de la consommation. Il propose une meilleure régulation des commentaires en ligne placés sur les comparateurs de prix, un encadrement plus strict des marketplaces, mais aussi et surtout impose une série de règles dès lors qu’un service en ligne met en relation deux consommateurs voire deux non professionnels.
Obligation de fournir une « information loyale, claire et transparente » et de décrire « les modalités de référencement, de classement et de déréférencement des offres mises en ligne », ou encore mise en place d’« un mode de règlement extrajudiciaire des litiges ». Seulement, ces dispositions n’ont pas été bien accueillies par les professionnels français. D’une part, le sujet est lui aussi à l’étude, cette fois au Conseil national de la Consommation. Pourquoi donc contourner ces travaux ? De deux, ils peuvent craindre une régulation peu glorieuse où finalement les acteurs étrangers seraient épargnés…
Ces critiques semblent être partagées puisque selon une source gouvernementale, l’exécutif aurait finalement décidé de ne pas le déposer. Il faudra voir donc si un texte de remplacement ne lui sera pas substitué.
Déjà des amendements de suppression chez les députés
Cependant, en l’état, l’amendement sénatorial demeure. De leur côté, d’autres députés entendent bien l’éradiquer du projet de loi sur la croissance.
Lionel Tardy, par exemple, a déposé cet amendement de suppression. S’il comprend la logique du texte voulu par les sénateurs, le député de Haute-Savoie estime que « les questions de monopole et d’information des utilisateurs doivent être traitées a minima au niveau européen. Imposer des obligations franco-françaises sur Internet n’est pas pertinent ». Il démonte dans la foulée chacune des obligations qui seraient imposées aux moteurs : « peut-on imaginer d’imposer à n’importe quelle entreprise d’obliger à faire référence à ses concurrents ? C’est pourtant ce qui est proposé ici. Or, les internautes sont autonomes et parfaitement libres d’utiliser les moteurs de recherche qu’ils souhaitent ». De même, il constate que « la notion de « moteur de recherche susceptible, compte tenu de son audience, d’avoir un effet structurant sur le fonctionnement de l’économie numérique » n’est pas définie ». Au final, il partage l’avis d’Emmanuel Macron : « il n’est pas sûr que l’ARCEP soit l’autorité pertinente pour réguler les moteurs de recherche ». Bref, selon lui, pareillement, « mieux vaut donc laisser la Commission européenne avancer sur ce sujet ».
Du côté de l’UDI, Yves Jégo n’en veut pas davantage. Avec d’autres parlementaires du groupe, le président du parti réclame aussi la suppression pure et simple de cette disposition. « Les objectifs poursuivis sont légitimes, mais ceux-ci doivent faire l’objet d’une véritable étude d’impact préalable et nécessitent d’être traités au niveau européen plutôt que national. Les risques de pénaliser les entreprises françaises et de porter atteinte à l’attractivité numérique de la France sont sérieux. Par ailleurs, les mesures proposées portent atteinte à la liberté d’entreprendre, rendant leur constitutionnalité incertaine ». Enfin, selon le collègue de Catherine Morin-Desailly, « ces mesures pourraient être considérées comme méconnaissant aussi les principes communautaires de libre prestation de service et de liberté d’établissement ».
Commentaires (91)
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Le débat, débile, sur Google montre, une fois de plus, que les politiques ne comprennent strictement rien à l’ère numérique.
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En quelques années la France s’est dotée d’un panel d’outil répressif contre les internets assez inquiétant mine de rien.
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Taper sur les gens plus simple et moins de risque que de le faire sur google et consorts …
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Une loi anti google pas si vite :) D’ailleurs on a bien vu pour les navigateurs, obliger mircosoft de laisser le choix n’a pas empêcher google et les autres de s’imposer et de continuer le déclin d’IE sans le décliner au niveau entreprise car je pense qu’il continue de dominer dans ce secteur. Je pense qu’ils sont persuadés d’y être pour quelques choses ou du moins d’apporter le choix au niveau utilisateurs.
Cette logique est tellement ridicule même dans le sens du moteur de recherche. Si l’on se base sur ce genre de critère. On devrait en permanence nous demander notre avis, “ ce site est Anglais voulez vous l’afficher ? ” , “les réponses de cette recherche contienne des données hors territoire voulez vous les afficher ? ” “ Attention ce site contient de la publicité ” etc….
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C’est maladroit et inadapté comme texte, mais en quoi ce texte gênerait les pauvres dans leurs communications ou serait un outil de contrôle de la population ?
@ActionFighter : la DUDH, elle a la même force contraignante que la déclaration des droits de Kévin pour faire tout ce qu’il veut dans sa chambre. C’est du simple affichage, donc les pécores peuvent y voir ce qu’ils veulent, c’est pas en l’invoquant qu’ils l’auront.
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Et bien il me semble difficile de ne pas constater l’importance qu’a désormais Google dans la visibilité des contenus web.
Le moteur de recherche a de facto une position dominante. Cela pose donc des questions sur les impacts économiques, politiques et sociaux.
Et le fait que le gouvernement décide d’imposer une certaine impartialité n’est pas une si mauvaise chose.
Les dispositions de cette loi peuvent évidemment être critiquées. Mais le principe ne me parait pas absurde.
Ce qui est assez ironique est que le gouvernement vise par cette loi, à instaurer un traitement loyal et non discriminant quant à la visibilité sur le moteur de Google. Mais dans le même temps rechigne à adopter une loi qui instaurerait la neutralité du net…
Ou quand les intérêts économiques sont plus convaincants que les principes démocratiques…
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Oula, oublie ça tu vas les brusquer!
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La Déclaration des droits de l’homme de 1789 est intégrée à la constitution de l’Etat français.
source :
http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/la-consti…
Donc, ça a un autre poids que la déclaration du kevin " />
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Bah, en utilisant autre chose ?
C’est dingue le nombre de gens qui attendent que ça vienne d’en haut, se réclament partisans de la liberté et ne voient que la contrainte comme solution.
Sans vouloir faire mon libéral à deux balles, on a toute une offre de moteurs de recherche/services webs.
Il y a pas mal de pays où sur la recherche, Google est aux choux en plus.
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C’est intolérable cette position dominante de la France sur le n’importe quoi.
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Tu serais pas en pleine confusion DDHCet DUDH??? " />
Donc je maintiens, se prévaloir de la DUDH pour défendre ses droits, c’est aussi utile que l’art. 4 de la déclaration de Kévin sur la pougne bi-quotidienne.
Et la DDHC est intégrée au bloc de constitutionnalité, puisqu’elle est visée au préambule. Pas à la constitution.
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En soit, qu’est ce qu’il existe à l’heure actuel pour les entreprise en situation de position dominante ? Je sais que MS avec windows a pas mal de soucis (c’est entre autre l’une des raisons de pourquoi Windows ne vient pas avec une suite complète de logiciel le rendant opérant directement à l’allumage)
Sinon, j’ai essayé Qwant pendant quelques semaines, mais au final, je reviens quand même à google, les résultats y sont bien plus pertinent. Google a encore une trop grande longueur d’avance pour que je puisse le remplacer.
Imposer des obligations franco-françaises sur Internet n’est pas pertinent
Hé, mais c’est presque intelligent ça !
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“Il y a aujourd’hui des abus de position dominante qui se conjuguent
avec la question des données personnelles, lesquelles permettent
d’affiner encore et toujours plus le marketing et l’orientation des
consommateurs”
C’est pas exactement ce que fait l’Etat avec la SNCF/EDF/FranceTelevision/la santé…. ? Ah oui mais là elle touche les dividendes c’est pas pareil " />
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blob741 a écrit :
Tu serais pas en pleine confusion DDHCet DUDH??? " />
Non pas de confusion.
Mais effectivement, on confond souvent les deux. " />
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Oui, et tu reprendras mon premier message et celui auquel je répondais. On parlait bien de la DUDH. Un truc mignon, consensuel, avec lequel tu ne peux pas ne pas être d’accord, mais qui pratiquement ne sert à rien. Bref, un truc très onusien …
Et la DDHC, on s’en branle puisqu’on n’en parlait pas !
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Je viens de refaire le test, il est trop lourd. " /> mais j’aime bien l’option changer de région.
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Pareillement , ils ont trop tripé sous LSD chez google le moteur cherche avant tout à fourgué du contenu monnayable la pertinence à décrue ces dernières années. Je le vois quand je fais des recherches sur des contenus scientifique.
Du coup je suis sur Bing US, une tuerie
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intéressant !
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Toi t’as pas pris ton chocapic ce matin… " />
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Au contraire, je trouve qu’ils comprennent plutôt bien comment ça marche, sur le coup.
Le problème n’est pas ce qu’ils comprennent du numérique, mais bien ce que EST le monde du numérique aujourd’hui : une méta-nation corporatiste dont les frontières sont fluctuantes et dessinées par les plus puissants.
Normal, du coup, que la France prise à part ait un rôle et une influence en somme assez discutable…
Abuser de notre position préférentielle dans un monde géopolitique très administratif (un avantage pour nous) serait tuer la poule aux œufs d’or, tout ça pour une histoire de moteur de recherche, qui d’ailleurs est déjà trop ancré dans les réflexes du commun des mortels.
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C’est quoi encore ces commentaires sans rapport avec la nouvelle ? " />
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Eh bien si tu vois les amendes infligées à Microsoft et à d’autres (Intel, IBM ?), aux obligations pour ce dernier à fournir les API et formats de fichier, même si ce fut lent (reproche que je conçois bien), ça a été fait. Alors certes c’est peut-être trop lent à l’époque du numérique, mais ce n’est pas inutile.
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OK, je prends note du second degré, mais certains postent ça au 1er degré…
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Inutile, bien sûr que non, je voulais dire qu’il me semble judicieux d’augmenter sérieusement la fermeté de l’Europe sur ce plan, et de ne pas traîner si on ne veut pouvoir sauver autre chose que des illusions (de souveraineté).
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Pour du grand publique, en effet, ça marche assez bien, mais dès que tu commence à attaquer à du velu et du technique, Qwant se retrouve à la ramasse. De même, c’est con, mais il manque un petit encart pompé de wikipédia comme google est assez pratique, ça évite de devoir quand même ouvrir la page Wikipédia.
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Tu n’as pas tort, du coup je fais du HS aussi. Mais parfois ça me saoule de voir ces commentaires et ces propos de comptoir.
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Tu es en train de faire de l’amalgame et de la généralisation.
En plus il y a de la concurrence entre les sociétés qui élaborent des traitements et des médicaments, et ce qui se vendra le mieux ce sont des médicaments plus efficaces et moins coûteux, et des traitements plus courts.
Je m’arrête là sur le HS.
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C’est mal fait, mais ça soulevé le fait que pour l’immense majorité des gens, internet se limite a ce qui est indexé par google (moi le premier " /> ). Ça vas devenir problématique vu que google veut imposer de plus en plus de critères pour ne pas référencer des sites…
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Windows Server 2008 " />, nous sommes super à jour " />
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Dans 10 ans, ils ne référenceront plus le porno au nom de leur morale.
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C’est une platine, je suis sur un client léger " />
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Les applications portables sont tes amis dans ces cas là.
Au passage, ça doit faire quelques années déjà que Chrome passe par une version installer dans le homedir justement pour pouvoir faire ses mise à jour sans droit administrateur. C’est dire les antiquités que vous devez vous taper.
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Chrome 30 et IE 9 " />, j’évite les applications portables, par prudence. On ne sait jamais ce que l’on pourrait se voir reprocher.
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S’il comprend la logique du texte voulu par les sénateurs, le député de Haute-Savoie estime que « les questions de monopole et d’information des utilisateurs doivent être traitées a minima au niveau européen.
Super, d’ici 2023 le parlement européen s’apprêtera à voter une directive qui, sur le conseil des lobbies de Google, n’imposera plus qu’une amende de un euro aux moteurs de recherches “ayant un effet structurant sur l’économie”.
Bien évidemment la directive sera repoussée à la Saint-Glinglin pour préserver les discussions du futur traité transatlantique d’alors, qui abrogera les pesantes restrictions qui empêchent les cours arbitrales de trancher les conflits état-entreprise relatifs aux problèmes sanitaires et permettra une correcte appréciation de la valeur d’une vie humaine et de la barrière douanière créée par le non-usage de l’anglais. Et ce afin d’estimer le préjudice à payer aux entreprises pour les espoirs de profits déçus suite aux investissements imaginés.
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Même sentiment vis-à-vis de la pertinence des recherches sur Google, je la trouve en déclin.
Un peu comme sur Android, depuis quelques mois on passe de la magie à la douche froide (Lollipop, Play Service, Agenda, et même des bugs sur Gmail)
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