Droit à l’oubli et devoir de vérification

Une fausse « news » indiquait qu’un joueur de football belge a exigé de Google le retrait de ses mauvaises notes délivrées par la presse, au titre du droit à l’oubli. Malgré un gros « fake » sur l’actualité source, plusieurs confrères français et internationaux, l’ont reprise docilement.

Le site belge lavenir.net a posté le 13 août dernier une fausse actualité croustillante. On y apprend que Eden Hazard a demandé à Google « d'effacer toute trace de son match peu inspiré contre l'Argentine (perdu par la Belgique 0-1), en quart de finale de la récente Coupe du Monde au Brésil ».

L'équipe du Brésil, David Guetta, Lance Amstrong

Cette actualité, classée en rubrique « humour » prévient encore que le joueur de football Belge a exigé du moteur qu’il fasse disparaitre toutes les notes de 4/10 délivrées par la presse internationale après sa prestation. « Il voudrait aussi disparaître de la liste des "11 flops du Mondial" diffusée par divers sites spécialisés et abondamment partagés ». Nos confrères un brin moqueurs ajoutent que « toute l'équipe alignée par le Brésil lors de la funeste demi-finale contre l'Allemagne (1-7) a introduit une requête similaire », tout comme David Guetta qui « a demandé qu’on soit supprimée la vidéo où il semble évoluer dans un monde parallèle lors du festival Tomorrowland à Boom ». Ou encore Lance Amstrong, qui a exigé du moteur américain l'effacement son passé parfumé au dopage. Sauf que « Google a déjà refusé la requête, expliquant qu'elle représentait le travail de dix informaticiens à plein temps pendant 50 ans. »

Cet article aurait dû rester dans sa catégorie « Humour ». Il a connu curieusement un sort différent. La presse française et internationale a repris ces informations au pied de la lettre, visiblement sans l’ombre d’une vérification. C’est le cas de BFMTV, Metro.co.uk qui place pourtant un lien sur l’article source, Yahoo, via Sportune.fr, des sites péruviens, et d’autres contrées encore.

« C'est effrayant »

Depuis, le site s’en amuse, un peu, et s’en émeut, beaucoup :  « Cette pseudo info était tellement ridicule explique son auteur, Xavier Diskeuve. Il y avait des allusions fictives assez grosses dans le texte puisque j'évoquais aussi des demandes similaires d'Elio Di Rupo, de Melchior Wathelet, de David Guetta ou encore de Lance Armstrong. Il s'agissait juste d'une humeur rebondissant sur l'importance de l'e-reputation et je l'ai mariée au fait que Google vient de mettre en ligne un formulaire pour le droit à l'oubli. C'était une simple boutade et c'est effrayant de voir que des gros sites répercutent sans recouper via Hazard lui-même, son club ou Google." »

On rappellera pour notre part que si le droit à l’oubli a été consacré par un arrêt de la CJUE du 13 mai 2014 dans les moteurs, tout et n’importe quoi ne peut pas être exigé. Ainsi, ceux qui prendront le temps de lire un jour cette décision savent que les juges ont justement réservé le cas des personnalités qui ne jouissent d’un droit à l’oubli que parcellaire, compte tenu de « l’intérêt prépondérant dudit public à avoir (…) accès à l’information en question ». Une bonne nouvelle donc : le droit à l’information et celui de la libre communication existent encore au lendemain de cette décision, tout comme l’obligation de vérifier ses sources avant de reproduire rapidement un contenu.