L’association VideoLAN a eu la surprise de découvrir la consultation lancée par la Hadopi sur son dossier VLC. Dans un billet d'opinion, Jean-Baptiste Kempf, membre de l'équipe de développement estime que cette consultation est un non-sens. Et il réexplique ouvertement ses positions déjà exprimées dans le mémoire initial de VidéoLan.
Marie Françoise Marais (présidente du collège de la Hadopi)
Au début de l’année 2012, VideoLAN a saisi pour avis la Hadopi. Ce 4x4 des lecteurs multimédias aimerait lire les Blu-Ray sauf que leurs dispositifs anticopies l’interdisent. Et pour cause, Videolan n’a pas accès aux données qui permettent cette interopérabilité.
La question qui se pose est alors simple : « de quelle manière l’association VideoLAN, éditrice du logiciel libre VLC media player, peut-elle mettre à disposition des utilisateurs une version du logiciel VLC media player permettant la lecture de l’ensemble des disques couramment regroupés sous l’appellation « Blu-Ray » et comportant des mesures techniques de protection (MTP), dans le respect de ses statuts et de l’esprit du logiciel ? »
La saisine de la Hadopi avait eu lieu au début 2012. Après plusieurs reports au fil de l’année, la Hadopi a annoncé le 6 février 2013 l’ouverture d’une consultation sur cette saisine. L’enjeu est simple à poser : est-ce que « la documentation technique et les interfaces de programmations » qui sont « visées à l’article L. 331-32 du code de la propriété intellectuelle intègrent les clefs de déchiffrement d’un contenu protégé et plus généralement les secrets nécessaires » cerne la Rue de Texel.
En face, Jean-Baptiste Kempf, estime cette consultation comme « un non-sens juridique ». Pourquoi ? Car la Hadopi sollicite des acteurs « pour interpréter les dispositions en la matière, ce qui est sa mission et ce qui ne devrait pas être fait par autrui ». Cette consultation serait alors « réalisée en méconnaissance des dispositions relatives à la mission de régulation et de veille dans le domaine des mesures techniques de protection confiée à la Hadopi et pourrait être considérée comme un moyen supplémentaire pour celle-ci de retarder la publication d’une réponse claire et non équivoque. »
Ne pouvant être à la fois demandeuse et consultant, l’équipe est d’autant plus contrariée qu’elle ne peut répondre à cette consultation. Dans un billet, le membre de Videolan, assisté de Marie Duponchelle, qui rédige une thèse sur les « Mesures techniques de protection et [les] droits du consommateur », redonne donc les clefs du problème :
L’article L.331-5 alinéa 4 du Code de la propriété intellectuelle pose que « les mesures techniques ne doivent pas avoir pour effet d'empêcher la mise en oeuvre effective de l'interopérabilité, dans le respect du droit d'auteur. » Les fournisseurs de mesures techniques ont alors l’obligation de donner « l'accès aux informations essentielles à l'interopérabilité. »
L'article L.331-32, alinéa 2 du Code de propriété intellectuelle dit que ces informations essentielles à l’interopérabilité sont « la documentation technique et les interfaces de programmation ». Mais dans sa note, Jean-Baptiste Kempf s’interroge : ces données « sont-elles les seules informations techniques dont ont besoin les éditeurs pour garantir l’interopérabilité de leurs logiciels avec une mesure technique de protection ? »
Comme un avion sans aile
Si oui, la porte est fermée. Si non, l’énumération du L 331-32, alinéa 2 n’est pas limitative. Ce qui penche pour cette interprétation est qu’en l’état, la liste ne permet pas l’application pleine et entière du L.331-5 alinéa 4 : en effet, « les seules documentations techniques et interfaces de programmation sont insuffisantes pour permettre l’interopérabilité effective d’un logiciel et d’une mesure technique de protection. »
Manque spécialement le système de chiffrement avec des clés. « En l’absence de fourniture des clés, la mise en oeuvre effective de l’interopérabilité sera donc impossible et les dispositions de l’article L.331-5 alinéa 4 ne pourront être respectées » insiste Jean-Baptiste Kempf qui manie la comparaison : « on pourrait dire que la mesure technique, avec sa documentation technique et ses interfaces de programmation, constituent la serrure, mais que le seul accès à la serrure ne suffit pas à l’ouvrir. Une mesure technique de protection sans les clés de déchiffrement, c’est donc comme une serrure sans les clés, il manque un élément essentiel à l’accès ».
Ordonner la fourniture de la documentation technique et des interfaces de programmation sans les clés serait donc inutile et entrerait même en opposition avec l’article L.331-5 alinéa 4. « En effet, on ne peut s’assurer que les mesures techniques n’empêchent pas « la mise en oeuvre effective de l’interopérabilité », si l’accès à l’intégralité des informations essentielles à cette interopérabilité n’est pas garanti. »
Certes, les clés de chiffrement ne sont ni de la documentation technique ni des interfaces, mais pour assurer l’article L331-5, disposition générale en matière de DRM, elles devraient malgré tout être qualifiées d’ « informations essentielles à l’interopérabilité ». Elles doivent donc être communiquées si l’on veut s’assurer d’une « mise en oeuvre effective de l’interopérabilité ». C’est du moins la thèse que défend VLC.
Commentaires (105)
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:/ trop technico-juridique à mon gout!
Pas compris grand chose " />
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En fait si l’HADOPI se dit incompétente (et fait appel à des consultants extérieurs), c’est bien que le fond du truc est que la HADOPI est une usine à gaz constituée d’un paquet de gens peu compétents sur les différents sujets, bref encore un truc d’incapables pour faire style que l’Etat prend le sujet au sérieux.
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ce qui est bien avec les comparaisons, c’est que tout le monde peut comprendre " />
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Comme d’habitude les représentants des ayant droit auront le dernier mot. Ce sera non donc.
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Ce qu’il faut comprendre :
=> VLC va donc sortir son lecteur et faire péter le blu-ray, les industriels vont porter plainte, le tribunal déboutera les industriels, et tout le monde sera ravis.
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GG JB !! Go ahead, make our day !! " />
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Euhh, Marc arrête avec ces photos please… Mets-donc celle de Bonjour Madame, au moins " />
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C’est pas faux !
Mais je crois que ça va bien plus loin que “VLC/Blourés” non ?
Cela ne pose-t-il pas les bases d’une incompatibilité insolvable entre le monde de l’open source et tout système de protection qui repose sur un mécanisme de “clé secrète” ?
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et si elles sont accessibles, moyennant finance et acceptation d’une licence, elles sont considérées comme accessibles ou pas " /> ?
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c’est vrai c’est pas la hadopi qui est competente pour répondre, ca serait plutto l’autorité de régulation des mesures techniques mise en place par la DADVSI de … oh wai…
cette autorité a été intégrée DANS la hadopi !
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Une serrure sans trou, un Vatican sans Pape
Je sais pas si c’est voulu, mais il vient justement de démissionner. " />
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L’AFUL a été auditionnée et a donné aujourd’hui son avis argumenté sur la question, en concluant que VideoLAN doit obtenir les clés.
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Dans tous les cas, les dispositifs de protection ne sont pas efficaces pour protéger les Blu-rays, sinon il n’y aurait pas autant de “BRRIP” disponibles sur certains sites.
Il y a plusieurs logiciels pouvant faire sauter ces protections et les pirates ne se gènent pas pour les utiliser. Les pirates n’ont pas besoin d’un outil tel que VLC pour faire des copies, au mieux, ça permettra aux consommateurs de lire leurs disques originaux.
A moins d’un cryptage avec clé stockée sur HW (et bien planquée), tout ce qui est logiciel est voué à l’échec, les pirates ayant les ressources et compétences techniques pour faire le reverse engineering de logiciels existants les utilisants.
La seule chose qui en découle, selon moi, est que l’interopérabilité est pour l’instant en suspens au nom d’une mesure technique de protection des droits d’auteur qui est inefficace.
De plus, si tu veux lire un Blu-Ray, et bien, tu as un vrai disque acheté, donc tu as payé l’accès au contenu.
La seule chose qui manque est juste la licence pour le lire au final, ce qui va à l’encontre de l’esprit de la loi concernant l’interopérabilité.
Bref, ça n’avance à rien et on n’est toujours pas sorti de l’auberge!
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Vu les (in)actions de la HADOPI sur le sujet, la réponse qui se fait attendre avec des tours de prestidigitation, c’est déjà un aveu d’échec critique de cette entité.
Si elle refuse l’accès aux données essentielles pour lire les BD (et autre), alors il faudra modifier la Loi et là…
Si elle ordonne l’accès aux données, ce sont les industriels qui ont soutenus ce genre d’ignominie qui vont être en colère et là…
Bref, elle veut pas donner de réponse et va tout faire pour noyer le poisson, voire même discréditer VLC et le libre en général.
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L’article L.331-5 alinéa 4 du Code de la propriété intellectuelle pose que « les mesures techniques ne doivent pas avoir pour effet d’empêcher la mise en oeuvre effective de l’interopérabilité, dans le respect du droit d’auteur. » Les fournisseurs de mesures techniques ont alors l’obligation de donner « l’accès aux informations essentielles à l’interopérabilité. »
Donc si l’Hadopi répond que les clés ne font pas partie des données essentielles à l’interopérabilité on pourra dire que l’interopérabilité n’est pas effective et attaquer les importateurs et le revendeurs de blu-ray au nom de cet article ?
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Bon courage à jb et à toute l’équipe de VideoLAN. Vous faites un super boulot.
Un petit message à la rédaction PCI :
Par pitié, arrêtez de mettre un photo de gros troll poilu pour tous les articles en rapport avec la HADOPI. Les articles sont hyper intéressants, mais bon dieu ça pique les yeux.
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Une bonne chose pour cette étude serait de demander à un fabricant de matériel électronique chinois/taiwanais/autre de quelles informations technique il a besoin pour produire un lecteur de blu-ray fonctionnel sorti d’usine.
Si les clés font partie de la réponse (obligatoire) on peut considérer qu’elles font parties de la documentation technique et donc même plus besoin de se poser la question si L’article L.331-32, alinéa 2 est limitatif ou non.
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Une interview de Marie Duponchelle bientôt ?
Ce serait sympa d’avoir son avis sur les MTP en général et sur le cas VLC en particulier " />
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(et pour bd+ je crois que c’est par là ..http://www.bdplusllc.com/ pas tout lu, donc on me corrigera si je me plante)
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Comment la mère triple M donne l’impression qu’elle se demande ou elle est et surtout quand elle a va recevoir son chèque !!!!!!
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Sinon, je viens de lire que VLC implémentera peut-être du streaming vidéo par BitTorrent. J’ai hâte de tester en espérant que ça se fasse. " />
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C’est quand même le monde à l’envers cette histoire: VLC est le lecteur le plus universel qui soit et probablement le plus utilisé au monde. Cela dit, pour “protéger” les intérêts de l’industrie du cinéma, on lui interdit de lire les Blu-Ray légaux afin de s’assurer de pouvoir emmerder un maximum les gens honnêtes.
C’est dingue cette histoire: on se plaint que l’industrie française est en berne, la créativité déclinante et la culture sur la pente descendante. Mais on fait tout son possible pour mettre des bâtons dans les roues de l’un des meilleurs logiciels grand public Français, tuer dans l’oeuf l’innovation et empêcher le bon fonctionnement de l’un des principaux outils de diffusion de la culture.
La question que je me pose est finalement: VLC ne devrait-il pas délocaliser et s’héberger sous des cieux à la législation plus clémente ?
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rhaa d’edit pci de mes deux … pour les brevets, je voulais dire qu’une solution était de breveter la technique uniquement … Après qu’elle soit implémentée matériellement ou logiciellement, bah elle reste protégée … donc tout soft l’exploitant tombe dedans .. pour la vidéo par exemple des techniques de débruitage ou autre peuvent très bien être brevetées, alors que la seule implem existante est logicielle, elle sert à illustrer la technique..
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Ce que j’aime beaucoup dans cette histoire, c’est Videolan qui propose à Hadopi de jouer à “Pile je gagne ! Face tu perds !”
Aujourd’hui, Hadopi essaye de faire tenir la pièce sur la tranche, mais il faudra bien qu’elle tombe d’un côté.
Merci Videolan " />
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Une question HS en guise d’interlude-détente ?
Au cas où, j’en ai une pour toi jb : vous en êtes où avec les codecs de ciné numérique (et/ou gestion de DCP) ?
J’ai rien suivi du tout mais ai bien vu que ça lit pas mal le ProRes avec quelques ratés perfectibles, et pareil pour les DCP en mxf… Des projets particuliers dans cette voie ?
Edit: Hmmm, j’me rends compte que j’ai pas posté au bon moment, ça me parait tumultueux ici ;)
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(Je me réponds à moi même, je ne peux plus éditer mon commentaire)
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La documentation technique doit contenir les clés pour permettre l’interopérabilité. En témoigne le document de spécification de la norme HDCP 2, qui contient des clés de test (en particulier une clé appelée lc128) que les différents matériels doivent utiliser lors des campagnes de test d’interopérabilité. Il ne contient pas les versions finales de ces clés, qu’on ne peut obtenir que sous licence (ce qui d’ailleurs constitue un frein à l’interopérabilité). On peut se demander si l’équipe VIDEOLAN ne peut tout simplement obtenir une licence d’AACS, ce qui implique bien sûr l’implémentation d’un systéme de sécurité. Après tout, pour implémenter une interface USB, HDMI, SATA, SD,… on a besoin d’obtenir une licence des différents consortiums qui les définissent. C’est sans doute pareil pour AACS, et si ce n’est pas le cas, il y a effectivement blocage.
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La documentation technique doit contenir les clés pour permettre l’interopérabilité. En témoigne le document de spécification de la norme HDCP 2, qui contient des clés de test (en particulier une clé appelée lc128) que les différents matériels doivent utiliser lors des campagnes de test d’interopérabilité. Il ne contient pas les versions finales de ces clés, qu’on ne peut obtenir que sous licence (ce qui d’ailleurs constitue un frein à l’interopérabilité). On peut se demander si l’équipe VIDEOLAN ne peut tout simplement obtenir une licence d’AACS, ce qui implique bien sûr l’implémentation d’un systéme de sécurité. Après tout, pour implémenter une interface USB, HDMI, SATA, SD,… on a besoin d’obtenir une licence des différents consortiums qui les définissent. C’est sans doute pareil pour AACS, et si ce n’est pas le cas, il y a effectivement blocage.
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Une serrure sans trou, un Vatican sans Pape
et des socialiste sans social " />
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En fait il semblerait que ce que j’ai dit plus haut ne soit pas juste et qu’on n’ait vraiment pas le droit de toucher aux DRM
http://www.maitre-eolas.fr/post/2006/07/27/408-loi-dadvsi-le-conseil-constitutio…
C’est vraiment un imbroglio ces textes à la con…
Pénible d’avoir des machins incompréhensibles et qui bénéficient toujours aux intérêts privés et pas aux consommateurs.
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Il est long, cet article.
Il suffisait de mettre la même photo, avec en légende “Les Ewoks ont 2D+1 en Savoir”.
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Hadopi, ip ip ip hourra……." />
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Ne pouvant être à la fois demandeuse et consultant…
@jb : Avez-vous fait porter la bonne parole par quelqu’un d’externe ? Il me semble que c’est une consultation publique…
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Bon? Alors?
On va pas attendre 107 ans. Faut que j’aille acheter mon lecteur de blu-ray pour PC.
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sylware tu fais comme tout le monde du patiente " />
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tiens ça passe maintenant dans les journaux nationaux :http://www.lemonde.fr/technologies/article/2013/02/14/pour-vlc-la-hadopi-fait-tr…