Droit des nouvelles technologies : le programme de la rentrée

Droit des nouvelles technologies : le programme de la rentrée

Une rentrée solaire

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Marc Rees

Publié dans

Droit

18/08/2016 10 minutes
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Droit des nouvelles technologies : le programme de la rentrée

À quelques encablures de la rentrée, nous profitons de l’occasion pour dresser un état des lieux des évènements touchant au droit des nouvelles technologies à ne pas rater à partir de septembre.

Les hotspots Wi-Fi et le statut du lien hypertexte

Comme exposé lundi, les yeux pourront d’abord se tourner du côté de la Cour de justice de l’Union européenne. Celle-ci va en effet statuer sur la question épineuse et ancienne du lien internet. L’enjeu ? Savoir si un lien vers un contenu illicite est également contaminé par cette illicéité. Autre sujet d’importance, celui de la responsabilité d’un entrepreneur, exploitant d’une entreprise de sonorisation, qui a laissé ouvert son hotspot d’où des faits de téléchargement ont été épinglés par une major, Sony Music. 

Des tours de vis sur la régulation de Skype ou Whatsapp

Toujours en Europe, la Commission européenne devrait dévoiler plusieurs lignes directrices afin d’envisager, un jour prochain, des règles similaires entre Skype, Whatsapp ou autres applications de messagerie d’un côté, avec de l’autre l’univers des opérateurs télécoms traditionnels. Le sujet n’importe pas seulement les consommateurs. Les services spécialisés savent qu’il devrait impliquer une collaboration nettement plus active des fournisseurs en ligne pour la réalisation des interceptions et autres atteintes à la vie privée autorisées par la loi. Selon le Parisien et le Figaro, l'Arcep devrait part ailleurs accélérer le sens de l'histoire en déclarant d'office comme opérateurs plusieurs services en ligne édités par Microsoft, Google ou encore Facebook. Rendez-vous est posé en septembre là encore.

La TVA sur l’édition électronique

Une consultation lancée par l’institution bruxelloise s’achèvera le 19 septembre. Elle porte sur l’avenir de la TVA sur les éditions électroniques tels les ebooks et les journaux en ligne, tous considérés actuellement comme des prestations de service où seul doit sévir le taux fort. De nombreux acteurs grognent contre cette iniquité avec leur version papier, souhaitant du coup une harmonisation des taux, si possible à la baisse.

Contestation de l’accord Éducation nationale – Microsoft

Plus près de nous, une audience de référé est programmée le 8 septembre prochain devant le tribunal de grande instance de Paris. Sa cible ? L’accord « gratuit » passé entre l’Éducation nationale et Microsoft . Selon plusieurs acteurs, impliqués sur le secteur du logiciel libre, ce contrat dans lequel l’éditeur s’est déplumé de 13 millions d’euros, est en indélicatesse avec le Code des marchés publics. Et pour cause, il aurait évincé d’autres solutions.

Facebook et Microsoft entre les murs de la CNIL

La Commission nationale de l'informatique et des libertés poursuit de son côté deux dossiers épineux. Le premier concerne Windows 10. Fin juillet, Microsoft a été mis en demeure de revoir des pans de son système d’exploitation, lequel serait en indélicatesse avec la loi de 1978. Par exemple, l’éditeur a bêtement oublié de bien informer ses clients « de la nature des données transférées » et « de la finalité du traitement » lors de la création d’un compte. Autre trou de mémoire : la société est accusée de ne pas recueillir valablement le consentement des utilisateurs lors de la création de l’identifiant de publicité unique, qui fait le bonheur du service comptabilité de Redmond. Enfin, toujours dans le florilège des critiques adressées par la CNIL, Microsoft s’abrite encore derrière le Safe Harbor pour expédier des flux de données personnelles aux États-Unis. Or cet accord a été invalidé par la Cour de justice le 6 octobre 2015

Microsoft n’est pas la seule société sur la sellette. Facebook fait aussi l’objet d’une procédure devant l’autorité indépendante, pour des raisons peu ou prou similaires : défaut de consentement, transfert sauvage de données outre-Atlantique, utilisation trop indiscrète de cookies, etc. La réponse de Facebook en main, la CNIL poursuit actuellement l’instruction du dossier avant de sceller sa réponse. 

L’éclectique projet de loi sur le numérique

Sur le terrain législatif cette fois, le projet de loi d’Axelle Lemaire sur la République numérique sera examiné par le parlement à partir le 27 septembre prochain. Ceci tient d’abord aux contraintes du calendrier parlementaire mais également aux contrariétés du droit européen.

Plusieurs de ses dispositions régulent la société de l’information. Elles ont dû pour cette raison être notifiées à Bruxelles au fil de leur adoption parlementaire. Or cette étape inévitable gèle durant 3 mois la procédure interne. Le texte devrait être en tout cas être promulgué dès le début octobre pour laisser alors place à la valse des décrets d’application. Plutôt qu'une valse, évoquons une rave party : près de trente sont programmés par la loi jusqu’à la fin de l’année.

Une flopée d’autres textes importants

Le projet de loi a été inscrit pour la session extraordinaire avec d’autres textes importants tels le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, le projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, la proposition de loi organique relative à la compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d'alerte ainsi que la proposition de loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

Toujours en septembre, une proposition de loi sénatoriale sera aussi examinée cette fois par les députés. Elle vise à encadrer l’usage des drones en France. Le texte envisage, en l’état, une obligation d’immatriculation des drones et de formation pour les pilotes outre l’introduction d’un délit de survol « par maladresse ou négligence » d’une zone interdite.

Vers une commission d’enquête sur la banalisation de la violence

Les sénateurs débattront aussi à la rentrée de la proposition de résolution signée de leur collègue Joëlle Garriaud-Maylam, destinée à créer une commission d’enquête pour évaluer « le rôle de la télévision, des médias en ligne et des réseaux sociaux dans la banalisation de la violence extrême ». Cette résolution, qui n’a pas de portée juridique, pourrait cependant être le terreau d’un nouveau round de textes sécuritaires en France, après la loi de programmation militaire (2013), la loi contre le terrorisme (2014), la loi sur le renseignement, la loi sur la surveillance des communications électroniques internationales (2015) ou les plus récentes loi sur la réforme pénale et celles relatives à l’état d’urgence…

D’ailleurs remarquons qu’une nouvelle proposition de loi contre le terrorisme a été déposée début août par plusieurs élus LR. Elle envisage de placer notamment sous surveillance électronique mobile les personnes à l’égard desquelles « il existe des raisons sérieuses de penser qu’[elle] constitue, par son comportement, une menace grave pour la sécurité et l’ordre public ». Des critères directement puisés dans la loi sur l’état d’urgence de 1955 que les élus de droite veulent sacraliser dans le droit commun. 

Dans le même temps, le CSA prépare de son côté un code de bonne conduite sur la couverture des actes terroristes, notamment les services de médias audiovisuels à la demande. Cette charte prévue par la récente loi de prorogation de l’état d’urgence ne concerne pas seulement cette période. Elle lui survivra donc.

Sénat
Le Sénat, crédits : Marc Rees (licence: CC by SA 3.0)

Et la copie privée ?

D’ici la fin de l’année, voire début 2017, seront lancées de nouvelles études d’usage en matière de copie privée. L’une des nouvelles cibles réside dans les PC hybrides. Ces PC à clavier détachable qui se transforment alors en tablette sont pour l’heure hors du champ de la douloureuse. Les ayants droit, en quête de nouveaux flux financiers, militent évidemment pour l’assujettissement de ces supports de stockage alors que ces produits se vendent comme des petits pains. 

Voilà pourquoi un marché public est en phase d’élaboration afin de jauger les pratiques de copie et permettre ensuite à l’instance administrative d’établir éventuellement un barème de perception. Autre piste, la prise en compte d’une logique de bundle pour les box et les téléphones. Concrètement, il s’agira d’appliquer un barème plus lourd à ces deux catégories d’appareils parce que leurs capacités peuvent être étendues par le branchement d’un disque externe ou d’une carte mémoire. Ces unités sont déjà soumises à la ponction, mais à un taux aujourd’hui nettement plus faible. 

La QPC sur la surveillance des communications hertziennes

Enfin, en octobre, le Conseil constitutionnel rendra sa décision sur la surveillance des communications hertziennes. Sauf surprise, il devrait mettre un terme à une brèche du Code de la sécurité intérieure béante depuis 1991, conservée par la loi sur le renseignement du 24 juillet 2015.

Concrètement, si l’empilement des textes a consacré un encadrement de façade des activités de surveillance, les communications sans fil sont aujourd’hui placées dans une zone grise (très très) foncée. L'article L.811-5 du Code de la sécurité intérieur explique en effet que « les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer, aux seules fins de défense des intérêts nationaux, la surveillance et le contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne ne sont pas soumises aux dispositions du présent livre, ni à celles de la sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de procédure pénale ».

En clair ? Les échanges Wi-Fi, Bluetooth, sur téléphone portable ou n’importe quelle communication qui n’exige aucune liaison filaire, soit d’innommables hypothèses, ne sont soumis à aucun cadre précis. En particulier, il n’est pas nécessaire de recueillir l’avis préalable de la Commission nationale du contrôle des techniques du renseignement. Un système qui évince en outre la possibilité pour les citoyens d’agir devant une formation du Conseil d’État pour faire valoir leurs droits.

Suivant l’avis du rapporteur public, le Conseil d’État a décidé le 22 juillet dernier de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité déposée par la Quadrature du Net, FDN et la fédération FDN aux neuf sages de la Rue de Montpensier. Ceux-ci ont trois mois pour rendre leur décision.

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Écrit par Marc Rees

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Les hotspots Wi-Fi et le statut du lien hypertexte

Des tours de vis sur la régulation de Skype ou Whatsapp

La TVA sur l’édition électronique

Contestation de l’accord Éducation nationale – Microsoft

Facebook et Microsoft entre les murs de la CNIL

L’éclectique projet de loi sur le numérique

Une flopée d’autres textes importants

Vers une commission d’enquête sur la banalisation de la violence

Et la copie privée ?

La QPC sur la surveillance des communications hertziennes

Commentaires (18)


Curieux de voir pour le statut du lien hypertexte. Cela pourrait faire mal d’un côté comme de l’autre.








jul a écrit :



Curieux de voir pour le statut du lien hypertexte. Cela pourrait faire mal d’un côté comme de l’autre.





C’est le même problème que “si je prends une photo d’une affiche contrefaite sur un mur”, la photo est elle une contrefaction ? la photo est elle illégale ? Si l’affiche n’est pas encore jugée contrefaite au moment de la photo, que devient le statut de la photo au moment où l’affiche est jugée contrefaite ?&nbsp;<img data-src=" />



Mais une fois la photo prise, changer l’affiche ne changera pas la photo (à la différence du lien hypertexte).








Oliverpool a écrit :



Mais une fois la photo prise, changer l’affiche ne changera pas la photo (à la différence du lien hypertexte).





Avec les mises en cache des différents opérateurs, FAI, moteurs de recherches etc. le lien peut être considéré comme figée, comme l’est une photo . Changer l’arrivée du lien hypertexte je changera pas le lien hypertexte et sa situation dans la page de départ.



Question 1 : un nom de domaine (brut) www.mon-domaine.com est il un lien comme un autre ?



Question 2 : l’url 1http://www.mon-domaine/index.php?page=ma_page et l’url 2 menant à la même page :&nbsphttp://www.mon-domaine/ma_page est il le même lien ?



Question 3 : une url dynamique qui mène vers une page qui n’est pas complètement la même en fonction des argument dans l’url ? c’est le même hypertexte ?



Question 4 : Combien de temps faut il pour cuire saignant un rôti de bœuf de 1kg ?





&nbsp;D’ailleurs remarquons qu’une nouvelle proposition de loi contre le terrorisme&nbsp;a été déposée début août par plusieurs élus LR. Elle envisage de placer notamment sous surveillance électronique mobile les personnes à l’égard desquelles « il existe des raisons sérieuses de penser qu’[elle] constitue, par son comportement, une menace grave pour la sécurité et l’ordre public ».&nbsp;





Ah ben c’est bien, ils vont pouvoir commencer par certains de leurs députés, sans oublier leur président <img data-src=" />








boogieplayer a écrit :



Question 4 : Combien de temps faut il pour cuire saignant un rôti de bœuf de 1kg ?





Je dirais environ 20-30min sans grande conviction <img data-src=" />



12 à 15 minutes par livre (1 livre = 500 grammes) pour cuire la viande de bœuf en rôti. La température à cœur à la sortie du four doit être de 50 à 55 °C pour une cuisson saignante. C’est malin, j”ai faim maintenant.<img data-src=" />


<img data-src=" /> merci de la précision, c’était dans la fourchette.








athlon64 a écrit :



Je dirais environ 20-30min sans grande conviction <img data-src=" />





tu préchauffes ton four à 260 °C

tu enfournes ton rôti, tu le laisse 6-8 min

tu baisses à 240°C et tu le laisses 30 min



tu l’arrose à mi cuisson !



<img data-src=" />









boogieplayer a écrit :



tu préchauffes ton four à 260 °C

tu enfournes ton rôti, tu le laisse 6-8 min

tu baisses à 240°C et tu le laisses 30 min



tu l’arrose à mi cuisson !



<img data-src=" />







c’est malin tout ca j’ai faim et il est 9h30…



pour en revnir a la niouze, le regulateur qui compte declarer MS et autres comme operateurs, les futures articles concernant des mises en demeure vont impacter le cours de l’action du pop corn



pas encore vu les conclusions. La décision est attendue dans de nombreux mois (et au delà)


J’avais retenu année 2016 et on approche de sa fin. Espérons que cela ne soit pas 2017.


Intéressante cette UV. On peut la faire avec le CNAM ?


Chic chic chic, on va rigoler !!!

[/obelix]


&nbsp;@ le rédac’ chef:

Une petite coquille au paragraphe “ Tour de vis sur la régulation de Skype et de Whatsapp” =&gt; l’Arcep devrait part ailleurs accélérer le sens de l’histoire &nbsp; … &nbsp;&nbsp; et le bouton ‘signaler’ a disparu ? je passe donc par ce canal …



Mes respect pour l’article, ceci ecrit …&nbsp;&nbsp; <img data-src=" />