La loi Renseignement n'est toujours pas entièrement applicable

La loi Renseignement n’est toujours pas entièrement applicable

Avant l'avenir, voir le passé

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Marc Rees

Publié dans

Droit

28/07/2016 4 minutes
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La loi Renseignement n'est toujours pas entièrement applicable

Dans la vague d’attentats qui frappe la France depuis plusieurs mois, le gouvernement est pris dans un étau. Les dispositions sécuritaires se sont enchaînées, réduisant d’autant les marges d'une nouvelle poussée normative. D'un autre côté, les textes votés ne sont pas encore tous appliqués, notamment un article de la loi Renseignement.

Après l’attentat à Saint-Étienne-du-Rouvray, le chef de l’État a ainsi assuré que « restreindre (les) libertés, déroger aux règles constitutionnelles, n'apporterait pas d'efficacité dans la lutte contre le terrorisme ». La petite phrase, soulignée notamment par Le Figaro, est une réponse aux propositions aux autres groupes politiques, du moins ceux débordant d’imagination comme cet élu qui rêve d'un Guantanamo à la française .

Cette judicieuse petite phrase a aussi l’avantage de passer sous silence que plusieurs textes portés par cet exécutif soucieux des normes fondamentales, ont été épinglés par le Conseil constitutionnel. Ce fut le cas avec la copie des données informatiques lors des perquisitions administratives dans le projet de loi sur l’état d’urgence, du moins sa version de novembre dernier. Et ce fut aussi le cas un article de la loi sur le renseignement, qui laissait un champ bien trop libre à la surveillance des communications électroniques dites internationales. À chaque fois le Conseil a considéré en effet qu'on  restreignait les normes fondamentales et dérogeait aux règles constitutionnelles...

Un décret d’application toujours pas publié

Si tous les yeux sont maintenant tournés vers l’avenir – quelles solutions, quels moyens pour lutter contre cette criminalité ? - il faut encore revenir sur la loi relative au renseignement pour constater qu’une année après sa publication au Journal officiel, l’ensemble du texte n’est toujours pas activé.

L’attention se porte sur l’article L. 863-2 du Code de la sécurité intérieure. Déjà, cette disposition, pourtant jeune d'un an, a été rectifiée très récemment avec la dernière loi de prorogation de l’état d’urgence et contre le terrorisme. Avec elle, les services spécialisés ne peuvent plus simplement « échanger » toutes « les informations utiles à l'accomplissement de leurs missions » (version loi Renseignement de juillet 2015), mais pourront maintenant les « partager » (version loi État d'urgence de juillet 2016). Une modification sémantique qui devrait se traduire par une meilleure mise en commun.

Le même article contient un autre alinéa qui s’adresse cette fois à l’ensemble des autorités administratives. Une notion très vaste puisque selon une ordonnance de décembre 2005, cela concerne « les administrations de l'État, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes gérant des régimes de protection sociale relevant du code de la sécurité sociale et du code rural ou mentionnés aux articles L. 223-16 et L. 351-21 du Code du travail et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif ». Bref, tout ce beau monde a également la possibilité de transmettre aux services « de leur propre initiative ou sur requête de ces derniers », toutes les informations jugées utiles à l'accomplissement de leurs missions.

Seulement, plus d’un an après la publication de la loi sur le renseignement au Journal officiel, le décret fixant les modalités et les conditions d’application de ces deux alinéas n’a toujours pas été pris par le gouvernement. On peut constater cette brèche dans cet échéancier : tous les décrets d’application ont été pris, sauf celui fluidifiant l’échange d’informations sensibles entre les services du renseignement, ou entre les administrations françaises et ces services. Sa publication était envisagée en décembre 2015. 

loi renseignement échéancier

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Écrit par Marc Rees

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Un décret d’application toujours pas publié

Le brief de ce matin n'est pas encore là

Partez acheter vos croissants
Et faites chauffer votre bouilloire,
Le brief arrive dans un instant,
Tout frais du matin, gardez espoir.

Commentaires (12)


“cette criminalité”



Merci à Nxi pour cette terminologie rafraichissante. ça finit par user tous ces perroquets qui n’ont que attentat comme vocabulaire.




tous les décrets d’application ont été pris, sauf celui fluidifiant l’échange d’informations sensibles entre les services du renseignement

Hé oui c’est toujours la guéguerre entre fonctionnaires, chacun prêche pour sa paroisse et refuse de travailler main dans la main parce que vous comprenez “c’est un coup à perdre son taf” ou “j’ai pas le temps de bosser avec d’autres services”. <img data-src=" /> <img data-src=" />


C’est vrai que ça change d’entendre de parler de criminalité plutôt que de guerre !

Chaque fois que j’entends que c’est une guerre, je pense : “non, on a affaire à des criminels” et je m’énerve tout seul…

Si les hommes politiques étaient aussi sages que Marc, ce serait bénéfique pour ma santé.



Marc Président !








CUlater a écrit :



Hé oui c’est toujours la guéguerre entre fonctionnaires, chacun prêche pour sa paroisse et refuse de travailler main dans la main parce que vous comprenez “c’est un coup à perdre son taf” ou “j’ai pas le temps de bosser avec d’autres services”. <img data-src=" /> <img data-src=" />





Perdre son taf pour un fonctionnaire, vraiment ? Et moi qui croyais qu’ils avaient la sécurité de l’emploi justement pour qu’ils puissent travailler correctement et sans avoir à pense àce risque là, justement.



Sous-entendu “boulot actuel”; “perdre” = changer de service.

Ce sont des paroles rapportées hein, dans le milieu ils hésitent pas à en faire tout un fromage dès que leur quotidien pépère est chamboulé.


J’en avais déjà parlé sur NXI, mais je reste convaincu que ´les administrations’ concernées n’auront jamais le budget et les moyens humains nécessaires pour faire le job ….

Merci Marc pour ce condensé d’information.

😄


Les fonctionnaires territoriaux, en plus que d’être plutôt moins payés que les autres et de devoir faire des concours pour pouvoir simplement postuler aux emplois territoriaux (qu’ils doivent chercher eux-mêmes) n’ont absolument pas la garantie de l’emploi.


Je ne pense pas qu’il y ait des fonctionnaires territoriaux dans le renseignement.


Certes, mais il faut bien rappeler les réalités des fonctions publiques.

Cela dit, le gros problème du renseignement c’est que chacun veut garder ses trucs par devers lui et que ça a été encouragé par un certain Sarkozy qui a cassé un système qui fonctionnait plutôt correctement et qui était moins étanche quand il s’est rendu compte que les gens du renseignement pouvait accéder à Tracfin (le truc qui s’occupe de la fraude fiscale). Curieusement ça avait semblé le déranger.

Depuis, je crains malheureusement qu’il n’y ait pas une très grande volonté de revoir tout cela et de faire un service qui fonctionne bien avec des passerelles d’échanges.


“sauf celui fluidifiant l’échange d’informations sensibles entre les

services du renseignement, ou entre les administrations françaises et

ces services.”



Quand on sait que l’un des reproches favoris des politiques est la difficulté de communiqué entre les services, ce retard ne manque pas de piquant.



Après techniquement cela doit être bien complexe à imaginer et à faire réaliser techniquement. Après le 11 septembre, les américains avait résolu la question en créant un openbar, résultat Wikileaks a obtenu énormément d’informations.


pourtant il existe bien le renseignement térritorial, j’ai bon ? <img data-src=" />


“La loi Renseignement n’est toujours pas entièrement applicable”



taxes et impôts sont plus rapides en application